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Falstaff, du « cerf gras » au « pourpoint rembourré de paille » : les paradoxes de l’excès

dans Société Française Shakespeare

Auteur(s) : Venet, Gisèle

  • Éditeur(s)
  • Date
    • 2008-02-10T01:00:00Z
  • Notes
    • Contribution à l’« art poétique » shakespearien – « lard poétique », ironiserait Falstaff, en caressant sa bedaine « rembourrée de paille » comme le pourpoint de l’acteur qui l’incarne, censé contenir les « tripes » du « cerf gras » – le personnage « hors norme » participe à ce titre du commentaire indirect de Shakespeare sur sa propre dramaturgie, mais non sans y ajouter la dimension politique d’un art de la subversion des modèles. L’« espace vide » de la scène est laissé vacant de toute intrigue nécessaire pour laisser libre cours à une écriture comique apparemment dépourvue de pertinence au regard de l’intrigue principale, fût-elle, comme dans les Henry iv, du plus haut intérêt politique. Une esthétique apparemment désinvolte de l’« impromptu » vient « farcir » le lieu scénique par des jeux de mots qui sont autant de jeux de théâtre : Falstaff pratique plus que tout autre l’art de renverser une situation par le simple renversement des mots. Pourtant ces « jeux d’esprits », qui firent la célébrité instantanée de Falstaff, donnent une préséance inattendue au verbe sur la chair chez cet homme dont aucun pourpoint de théâtre ne suffirait à contenir l’envahissant tour de taille. Shakespeare abuse de cette esthétique du détournement des apparences qu’est le théâtre pour ajouter son grain de sel à l’apprentissage paradoxal de l’« hypocrisie » et de l’« histrionisme » infligé par ce mentor imprévu à son Prince. Par delà la mise à mort sacrificielle du cerf gras sous la forme d’une mise à nu de l’acteur déshabillé de son pourpoint, à la fin de la deuxième partie d’Henry iv, Shakespeare est de connivence avec son spectateur d’alors, qui sut y répondre par des applaudissements nourris, en partageant avec lui un jeu sur les mots : l’« énorme » Falstaff donne chair, et donne sa chair en sacrifice, au mot « enormity » qui condamne toute infraction morale comme délit politique selon les Homélies qui fondent l’ordre Tudor. L’art poétique narguant l’art politique?
  • Langues
    • Français
  • Droits
    • info:eu-repo/semantics/openAccess .
    • https://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/
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