Quel personnage étonnant que Tristan Bernard !

Avocat à son entrée dans la vie active. Il sera successivement fabricant de bicyclettes, directeur du Vélodrome, plus tard directeur de théâtre, sans avoir jamais pensé qu'aucun de ces emplois était fait pour lui.

En revanche, dès qu'il prend la plume, le public et la critique savent qu'un auteur, un vrai, vient d'entrer dans le monde des lettres.

Oh, un auteur qui ne se prend pas trop au sérieux ! S'il est moraliste - philosophe sceptique, dit-il volontiers -, c'est à travers un sourire éclairant chacune de ses pensées. Ses amis sont Lucien Guitry, Courteline, Jules Renard, Alphonse Allais, Alfred Capus, Toulouse-Lautrec. Léon Blum, et c'est avec eux un feu d'artifice de bons mots.

Les pièces qu'il écrit sont une guirlande de succès : Triplepatte, Le Petit Café, Les Jumeaux de Brighton et, bien sûr, l'Anglais tel qu'on le parie.

Tristan Bernard apprécie la vie, le jeu, les courses, les femmes, même si on peut le croire un brin misogyne : l'amour, c'est comme les champignons, quand on s'aperçoit qu'il est mauvais, c'est trop tard...

La génération d'aujourd'hui connaît son nom surtout pour : sa fécondité d'invention, les innombrables mots d'esprit qu'il semait sur sa route comme autant de petits cailloux d'or sur toute une palette nuancée, de la tendresse au coup de patte incisif.

Sa verve était plus forte même, que les temps difficiles.

Non seulement je suis juif, disait-il pendant la guerre, mais encore mes moyens me permettent d'être israélite...

Si le rire est le propre de l'homme. Tristan Bernard aura bien mérité du genre humain, pour lui avoir fourni tant d'occasions de sourire.