L'âge moderne avait espéré changer le monde. Il n'y est pas parvenu. L'homme contemporain est confronté à l'imperfection, dont il avait cru pouvoir se défaire. A force de passer de rêves en utopies, il a perdu les significations de ce monde ordinaire qu'il ne comprend plus.

L'homme contemporain voudrait bien qu'une morale existe. Mais il ne sait sur quoi la fonder. Il n'est pas pour autant amoral. Il reconnaît le bien et le mal dans l'instant, s'émeut ou s'indigne. Le relativisme triomphe. Pourtant une idéologie clandestine se déploie, imposant son conformisme par des moyens tortueux.

L'homme contemporain s'inquiète de voir dans la démocratie un chef-d'œuvre menacé. Sans la concurrence entre diverses visions du monde, la démocratie moderne perd sa signification. La technocratie récuse le débat démocratique en laissant croire qu'il n'existe qu'une seule réponse aux problèmes politiques. Par ailleurs, les droits se sont à la fois sacralisés et multipliés, ce qui prohibe une juste réflexion sur les problèmes actuels de nos institutions.

L'homme contemporain a exilé Dieu. A défaut d'éternité, il cherche de nouvelles immortalités symboliques, par le biais des sectes ou de l'écologie. Ce siècle lui a appris que rien n'est acquis, ni la civilisation, ni la paix, ni l'abondance.

D'où son souci. Pour y répondre, il lui faudra comprendre que l'amélioration du monde ne lui est pas due. Et que tout progrès reste livré à sa vigilance.