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Livre

La médecine et la maladie dans le théâtre de Molière


  • Éditeur(s)
  • Date
    • 1998
  • Contenu
    • T. I, Sganarelle et la médecine ou De la mélancolie érotique ; T. II, Molière et la maladie imaginaire ou De la mélancolie hypocondriaque
  • Notes
    • Bibliogr. p. 725-816. Index
  • Langues
    • Français
  • Description matérielle
    • 2 vol. (LXXII-716-IX-844 p.) : fac-sim., couv. ill. en coul. ; 23 cm
  • Collections
  • Titre(s) d'ensemble
  • Sujet(s)
  • ISBN
    • 2-252-03190-5 ;
    • 2-252-03191-3
  • Indice
  • Tables des matières
      • SommaireVII
      • Présentation générale. Mome et esculapeXI
      • Principes d'études: privilégier l'examen de la relation entre médecine et maladie comiques au lieu d'analyser l'une et l'autre de manière autonome; éclairer à la lumière de la science médicale d'antan les maladies pour rire que la comédie met en scène. Celles-ci se définissent toutes comme des formes diverses d'une même affection: la pathologie mélancolique. But de l'étude: rétablir la continuité d'une démarche qui, du Médecin volant au Malade imaginaire, plante ses jalons jusqu'à faire surgir à terme la conception improbable et inouïe du caractère d'Argan. Et montrer par là que, si on ne lui connaît certes aucun modèle dans la tradition littéraire antérieure, du moins ce personnage ne manque-t-il pas d'antécédents dans l'oeuvre du poèteXII
      • Une fois posés ces principes et ces buts, il reste que l'ouvrage se donne aussi pour enjeu l'analyse des relations entre la satire de la médecine et les facéties de la mystification "morbide". On tâchera de replacer l'une et l'autre dans le cadre esthétique du ridicule moliéresque, et de montrer qu'elles se répartissent entre ses deux formes majeures: la chimère qui s'illusionne et la marotte obsessionnelle. Par leur sujet comme par leurs thèmes, ces comédies invitaient de toute façon le poète à une réflexion sur les déformations ridicules imposées à la nature par l'imagination égaréeXVII
      • 1 - La dramaturgie "médicale" de MolièreXXI
      • Inventaire du répertoireXXI
      • Résumé de l'intrigue ou des passages de l'intrigue intéressant la médecine dans Le Médecin volant, Dom Juan, L'Amour médecin, Le Médecin malgré lui, Monsieur de Pourceaugnac et Le Malade imaginaireXXI
      • Problèmes d'attribution et d'édition des textes: Le Médecin volant est-il de la main de Molière? L'hypothèse d'une attribution tardive à Sganarelle d'un rôle écrit auparavant pour un autre personnage-type du registre farcesque. L'hypothèse d'un faux ou d'une rédaction collective. Raisons de rejeter ces propositionsXXIV
      • Arguments plaidant en faveur de l'édition 1683 de Dom JuanXXX
      • Hypothèse d'un état antérieur à celui que rapporte l'édition officielle du Malade imaginaire (1682): traces d'un brouillon préparatoire ou d'une version antérieure à la leçon définitive? Un examen attentif de critique interne contraint à rejeter cette interprétation. Éléments d'explication sur la genèse probable de cette transcription contrefaiteXXXI
      • Cohérence du répertoireXXXVII
      • Comparaison entre les oeuvres retenues. Structure dramatique: elles ressortissent toutes au modèle de la mystification par travestissement, articulée en trois moments qui de manière générale correspondent à peu près aux trois actes de la pièceXXXVII
      • Choix esthétique: l'héritage de la farce et le modèle musical et chorégraphique de la comédie-ballet y fusionnent leur génie dans la cascade alerte et rythmée de l'intrigue et du jeu dramatiquesXXXIX
      • Thèmes traités: satire médicale et mystification morbide y suggèrent une réflexion morale dont la signification va s'enrichissant d'oeuvre en oeuvre tout en conservant la même optique: dans chaque cas, la relation entre médecine et maladie s'inscrit dans le cadre large des rapports entre cynisme et illusion, imposture sociale et cécité morale, thèmes favoris des méditations et des leçons délivrées par l'oeuvre de MolièreXLII
      • Effet satirique: le poète y brocarde régulièrement l'esprit de corps, la sottise et l'imposture d'un savoir lui-même travaillé par des querelles intestines dont le texte comique aime à se faire l'écho railleurXLVI
      • 2 - Propositions et perspectives d'étudeLI
      • L'hypothèse autobiographiqueLI
      • Aperçus sur la "vie maladive" de Molière. Ce que nous apprennent les documents conservés sur la dégradation de sa santé et les traitements qu'elle appelaLI
      • Les tentatives de diagnostic rétrospectif esquissées par la critique moliériste: Molière hypocondriaque et pulmonaireLIV
      • Les hypothèses formulées sur les relations entre l'homme et l'oeuvre: explication de l'acerbité satirique du poète par son expérience malheureuse de la science médicale de son temps et la rancoeur qu'il en aurait conservée. Portraits de Molière en malade désespéré et aigri, en rationaliste impitoyable pour les piétinements d'une science qui refusait de progresserLV
      • La projection du créateur dans ses rôles: portraits de Molière en Argan et d'Argan en Molière, sous le signe de la neurasthénie ou de l'embarras gastrique, voire de l'inconscient individuel ou collectif. Les limites de toutes ces approches; examen critique de leurs présupposésLVIII
      • Une dramaturgie de la mélancolieLXIII
      • Le diagnostic de Pourceaugnac: une mélancolie hypocondriaque, imputée à une remontée de vapeurs nées dans la rate et attaquant le cerveau. Le même diagnostic, mais divisé en trois étapes, cherche aussi à rendre compte du cas de Lucinde dans L'Amour médecin: l'origine de sa mélancolie est attribuée alternativement à un dérèglement des viscères du bas-ventre émettant des vapeurs hystériques qui lèsent le cerveau, et à une dépravation de l'esprit responsable d'une fureur érotique. On relève la même ambivalence dans l'évocation et l'interprétation (pseudo-)médicale des maladies que feignent les héroïnes en mal de mari dans Le Médecin volant et Le Médecin malgré lui. Le modèle se complique chez Argan: les dérèglements supposés de son corps décalquent sans jamais la nommer la diathèse hypocondriaque, mais le délire de son esprit se manifeste par un entêtement iatrophile qui boucle en cercle vicieux son illusion morbideLXIII
      • État de l'empire mélancolique en 1660: le triomphe de l'humeur noire dans les dernières années de la Renaissance, la persistance de son emprise au XVIIème siècle, mais le retour cyclique à une conception négative du mal dans la France classique après le culte que lui a voué l'Âge baroqueLXIX
      • Introduction. Sganarelle et la médecine3
      • Recensement et examen des comédies où apparaît Sganarelle: le personnage s'y caractérise par la contrainte à laquelle l'intrigue le soumet et dont il tâche de se dégager par ruse ou dont il subit par force la pression qui le ridiculise. Le rôle du "Médecin malgré lui" constitue la synthèse de ces situations de contrainte qu'incarne avec bonheur le travestissement médical, masque plusieurs fois adopté par Sganarelle lors de ses réapparitions dans l'oeuvre de Molière. Sganarelle et la médecine: Le Médecin volant, vivier de traits pour les futures comédies médicales du poète et fruit de l'adaptation pratiquée sur une tradition dramatique héritée par lui. Le travail d'élaboration du Médecin malgré lui à partir du Médecin volant et son influence sur les oeuvres qui lui succèdent. Le trait commun au Fagotier et au serviteur de Dom Juan: la goguenardise. Sganarelle, Dom Juan et la question médicale: une propédeutique au débat sur la foi et ses dogmes3
      • Opposition entre les comédies distribuant Sganarelle dans le rôle du médecin d'une part, et d'autre part L'Amour médecin où de véritables praticiens élaborent un diagnostic "savant". On regroupera donc pour les étudier de concert Le Médecin volant, Le Médecin malgré lui et Dom Juan, comédies où Sganarelle se trouve travesti en médecin. Seront ensuite analysées dans le cadre d'une étude autonome de L'Amour médecin les données pathologiques qui éclairent la maladie érotique feinte par Lucile et les deux Lucinde10
      • Première partie. Sganarelle médecin15
      • Chapitre premier. "Le Médecin volant", comédie d'apprentissage17
      • 1 - La tradition du Médecin volant avant et après Molière21
      • La composition de l'oeuvre est plus élaborée qu'il n'y paraît. Le même archétype du "Médecin par fourbe" dont elle procède est à l'origine aussi des deux autres comédies de Molière qui mettent en scène une feinte maladie d'amour21
      • Les acquis de la critique moliériste22
      • Recensement des versions jusqu'ici identifiées, conservées ou perdues. Bibliographie des études critiques consacrées à cette tradition: une moisson inégale, sans synthèse des données engrangées.
      • Une source espagnole: "El Acero de Madrid"30
      • Résumé de l'intrigue30
      • Étude comparée avec celle du Médecin volant: la ruse de la feinte maladie, le diagnostic et les remèdes du faux médecin, l'embryon du subterfuge de la fausse gémellité. L'absence des voltiges du médecin dédoublé pose la question de la chronologie entre version espagnole et tradition italienne. Incidence sur la relation hypothétique entre les trois comédies médicales de Molière et leur modèle: au lieu d'une filiation directe de l'une à l'autre, il convient de supposer plutôt un démontage analytique isolant l'archétype qui aura été par trois fois sollicité, modulé et ornementé de diverse manière par Molière32
      • Les "Medico volante" italiens36
      • Recensement et description bibliographique des versions déjà redécouvertes de Trufaldino medico volante et de celles que l'on se propose d'ajouter à cette liste. Les quatre éditions: vénitienne, romaine, milanaise, bolonaise. Francesco Leoni n'est pas l'auteur du texte, qui dut être composé autour de 1670 à partir d'un canevas dell'arte36
      • Mise en parallèle de Trufaldino medico volante, du canevas Magliabechiano et du texte Casamarciano. Leur relation avec El Acero de Madrid: plusieurs indices plaident en faveur de l'antériorité de la comedia espagnole. Par rapport à elle, les versions italiennes privilégient les voltiges du médecin au détriment de la place faite à l'intrigue amoureuse40
      • Le "Medico volante" hors d'Italie: résurgences françaises et anglaises46
      • Le canevas Biancolelli: résumé des scènes conservées. Reconstitution hypothétique de l'intrigue. Son origine: le Medico volante de Scaramouche, jamais cité, dont nous proposons un témoignage certifiant qu'il était visible sur la scène parisienne en 1647, et qui pourrait bien être aussi la source directe du Médecin volant de Molière. Le texte de Biancolelli a dû subir l'influence conjuguée de ces deux prédécesseurs illustres46
      • Le canevas anglais tardif Harlequin Prince in a Dream, fruit de multiples influences et interpolations, atteste à la fois l'épuisement de la tradition du Medico volante et l'influence en retour exercée par l'oeuvre de Molière sur les Italiens du XVIIIème siècle53
      • Chronologie hypothétique des versions recensées56
      • La chronologie plausible des quatre versions italiennes entre elles et par rapport à l'oeuvre de Lope de Vega. Arguments historiques, dramaturgiques et thématiques en faveur de l'antériorité de celui-ci. Le thème de la maladie fictive guérie par un médecin de complaisance remonte beaucoup plus loin dans la tradition occidentale que celui de la fausse gémellité: les Italiens ont pu l'imaginer et le greffer ensuite à la faveur de l'esquisse qu'en offrait El Acero de Madrid. Un exemple de cette tradition de la fausse maladie d'amour: "Olynthe", nouvelle de Charles Sorel. Preuves annexes de l'antériorité du modèle espagnol par le rôle que joue la duègne dans les différentes versions recensées, par la fréquente présence des médecins et de la médecine d'amour sur la scène ibérique, plus que dans la tradition italienne, par l'emploi du terme médical "opilation", enfin par la cohérence des traits diagnostiques et thérapeutiques que disséminent inconsidérément les comédie italiennes56
      • Antériorité plausible du canevas Magliabechiano sur la comédie de Trufaldino. Arguments tirés de la gêne que manifeste Isabelle dans cette version-ci devant l'examen urinoscopique réclamé par Trufaldino, et de la présence incongrue d'un diagnostic de podagre: héritages vraisemblables d'un canevas dell'arte antérieur. Caractère plus tardif du canevas Casamarciano, répertoire contradictoire de tous les traits rencontrés dans les autres textes. Argument fourni notamment par la mention du tour de clef qui oblige le médecin à "voler" par la fenêtre: probable trouvaille de Molière récupérée après coup mais maladroitement exploitée par la tradition napolitaine61
      • Médecins feints et volants sur la scène française66
      • Le Médecin volant de Boursault, décalque versifié de celui de Molière, camouflé en imitation d'un original italien prétendu: arguments fondés sur la distribution et la conduite de l'intrigue66
      • Les Eaux de Pirmont de Chappuzeau, souvenir direct d'El Acero de Madrid. Quelques entremeses espagnols au rôle secondaire71
      • L'utilisation par Molière des "chutes" de son Médecin volant pour ses autres comédies médicales74
      • L'arbre généalogique hypothétique des différentes versions européennes du Medico volante75
      • 2 - Analyse comparée des textes: l'originalité de Molière77
      • Examen comparé des distributions77
      • La cellule de base; les rôles annexes. Galanteries espagnoles; équilibre italien entre romanesque et bouffonnerie; déséquilibre au profit du rire chez Molière, concentration de l'intrigue sur Sganarelle et nouvelle définition du comique qui participe de manière essentielle désormais à la composition et aux situations, au détriment même de la cohérence de l'intrigue77
      • Examen comparé des intrigues82
      • Traits communs aux textes examinés: structure en trois parties; évolution vers une concentration autour de deux pôles: le serviteur médecin et le serviteur volant. Situation de Molière au coeur d'une tradition à laquelle il participe de plein droit. Analyse des retranchements et des ajouts effectués par les Italiens sur le modèle espagnol. Les suppressions pratiquées par Molière s'inscrivent dans ce droit fil: le sacrifice de l'intrigue à l'action et des joueurs au meneur de jeu favorise la clarté et l'unité d'intérêt82
      • Examen comparé des scènes d'intrigue médicale. L'élaboration de la ruse: le rôle du médecin fictif est distribué au valet plus ou moins déluré; Sganarelle, de tous le plus balourd, est celui qui connaît la plus ample métamorphose sous l'effet de son masque. La feinte maladie est définie de façon moins nette dans les versions tardives. Le diagnostic et la cure. Le redoublement de la visite à la malade chez les Italiens et sa suppression logique par Molière. La confrontation du faux et du vrai savant: le choix original de Molière illustre son esthétique du ridicule qui procède de l'imitation des travers observés plutôt que de leur déformation caricaturale. Le génie de chaque tradition: l'esthétique de l'allusion complice en Espagne, l'esthétique de l'impression chez les Italiens, l'esthétique du naturel et du ridicule chez Molière89
      • Les scènes du "médecin volant" proprement dit. Étude comparée du détail de l'action: le canevas Casamarciano et ses effets d'abondance. L'optique de Molière: l'illusion du dédoublement est favorisée par la distinction des plans et par la distribution des deux Sganarelle chacun dans un espace propre et distinct. Principe de son adaptation: le dosage entre l'illusion consentie et la lucidité conservée, plutôt que le plaisir de la pure virtuosité ou le vertige baroque de l'illusion comique94
      • Conclusion: le jeu des masques101
      • Le principe dramatique du Médecin volant de Molière réside dans le jeu du masque, tour à tour grotesque, social, moral et dramatique. Le masque comme facteur de cohérence de l'intrigue: la superposition des faciès de Sganarelle, du "Médecin" et de "Narcisse", dans les dernières scènes de la pièce, permet d'évaluer la métamorphose par travestissement que subit le héros; Narcisse incarne par fiction ce qu'était pour de bon Sganarelle dans les premières scènes. Le Médecin volant constitue l'emblème des relations du comédien avec les personnages de ses rôles, en quelque sorte l'emblème du théâtre101
      • Chapitre second. "Le Médecin malgré lui", farce transcendée105
      • 1 - La tradition indo-européenne du "Médecin par force"109
      • Répertoire général des textes orientaux et occidentaux qui jalonnent cette tradition et permettent de la reconstituer109
      • Du "Çukasaptati" au "Vilain mire"112
      • Le quarantième conte du Çukasaptati. Le fabliau du Vilain mire: mécanisme du renversement de situation et de la réversibilité mimétique et réparatrice112
      • Lecture allégorique du Vilain mire à travers l'imaginaire des trois fonctions de la société indo-européenne. La ruse exaltée par le récit projette de manière spéculaire au sein de la fiction son principe de fonctionnement narratif117
      • Trois axes d'interprétation, au total: un rituel conjugal, une interprétation ouverte du schéma trifonctionnel, une allégorie des pouvoirs symboliques de l'écriture et de l'écrivain123
      • Variations médiévales sur le sujet du "Médecin par force"124
      • La version de la Compilatio singularis, résumé moralisé du fabliau. Originalité du Médecin malgré lui par rapport à l'optique des versions médiévales: linéarité et irréversibilité de l'action, disparition de toute signification historique ou morale et promotion esthétique de la médecine parodiée qui intervient comme facteur de cohérence, comme principe dramatique et source du comique, au détriment d'une esthétique de la ruse plus ou moins allégorique124
      • L'Exemplum de Jacques de Vitry, version moralisée et tronquée, leçon de défiance envers la parole cauteleuse. La scission des épisodes du conte en deux récits sans relations entre eux. Le Conte moralisé de Nicole Bozon, autre exemple de récit enveloppé dans une visée morale. Le Médecin malgré lui au contraire tire son sens et sa cohérence d'une cascade de ruses librement associées. Théobald Anguilbert. Les Voyages en Moscovie d'Adam Olearius, témoignage de la fécondité du modèle128
      • Les modèles italiens133
      • Grillo medico: le traitement scabreux de la fille du roi, rituel de défloration et "cure" de la virginité. Ces allusions gaillardes sont explicitées dans la Serée de Bouchet traitant de "Grillo médecin"; le parti tiré de ce trait par Molière. Une tradition parallèle, celle du "docteur omniscient": similitude de thème et de distribution entre la tradition du "médecin par force" et le conte du Somadeva. Rapprochement confirmé par la version mongole du Vetâlapantschavinçati et la tradition lithuanienne qu'en a recueilli Schleicher, où apparaît un personnage de fagotier. Le motif de l'hôpital vidé de ses malades133
      • Le scénario italien de Pulcinella medico a forza: il est sans aucun doute postérieur au Médecin malgré lui, dont il associe le thème avec celui de L'Amour médecin sur le fond d'une intrigue empruntée au Medico volante. La double personnalité du héros de Molière: paysan de farce française et zanni de canevas italien. La richesse dramatique qui en découle139
      • Bilan généalogique143
      • Stemma de la tradition du "médecin par ruse et par force". La position du Médecin malgré lui dans le stemma. Le trait emprunté à Rabelais. Conclusion du parallèle: la spécificité dramatique de l'adaptation effectuée par Molière143
      • 2 - Du Fagotier au Médecin malgré lui: la transcendance d'une farce149
      • Esprit et méthode de la "contamination"149
      • Un triple phénomène d'expansion, d'application et de contamination explique l'évolution du Fagotier, farce perdue dont on peut restituer les grandes lignes, jusqu'à la comédie en trois actes que l'on connaît. Ressort de l'expansion: le rôle de Sganarelle. Matière de l'application: l'épicurisme diffus professé par le genre comique. Nature de la contamination: la fausse médecine appelle la feinte maladie et l'intrigue amoureuse qu'elle sert149
      • Principe d'ensemble: le rôle central du déguisement médical. Technique de la fusion entre les deux sources majeures: éléments du Médecin volant conservés dans la comédie, plus ou moins amplifiés. Hypothèses sur la distribution et l'intrigue du Fagotier152
      • Traces de la farce dans "Le Médecin malgré lui"156
      • Génie de la farce à la française et à l'italienne156
      • Le traitement du personnage de Sganarelle en héros de farce: le corps, machinerie gestuelle et physiologique; une conduite et des réactions schématiques; une fantaisie verbale facétieuse et riche d'inventions. Un principe de décalage du signe. Le grotesque de la farce et le ridicule de la comédie: le comique médical dans Le Médecin malgré lui oscille entre les deux pôles157
      • Une dramaturgie de type farcesque: structure peu cohérente, par juxtaposition. Corrections destinées à améliorer la cohésion et la vraisemblance: dans l'exposition; lors de la rencontre entre les deux intrigues; par l'inclusion du héros dans un contexte culturel, familial et social; au dénouement même161
      • La transcendance de la farce167
      • Le génie des deux petites farces sollicitées par Molière: la ruse fondée sur un déguisement; la duplicité de langage et de visage qui provoque des effets de contraste abrupt et fréquent167
      • Dramaturgie: analyse comparée des fragments d'écriture ramassée et des passages diluant l'action en dialogues stichomythiques. Le Médecin malgré lui a hérité cette maîtrise rythmique qu'il accomplit en la mettant au service d'une dramaturgie du revirement et du conflit. Les scènes de confrontation verbale: similitudes et variations169
      • Les scènes de duplicité: de langage; de visage: déguisements latents et patents dans la comédie, va-et-vient entre fiction et vérité. Souvenir et accomplissement de l'esprit farcesque dans le comique de l'imaginaire et de l'illusion: l'égarement chimérique et euphorique est certes dénoncé, mais exceptionnellement toléré à la faveur de la farce carnavalesque et de ses masques bouffons182
      • Chapitre troisième. La médecine de Sganarelle entre réalité et fantaisie187
      • 1 - La "science" de l'imposteur: vraisemblance ou bouffonnerie?191
      • Des diagnostics informés191
      • L'urinoscopie dans Le Médecin volant. Histoire de l'urinologie. La part de l'information exacte dans les saynètes de farce sur le sujet. Origine de la prétendue gustation de l'urine par le médecin191
      • Débat dans Le Médecin malgré lui sur la question de savoir lequel des deux sexes est le plus aisé à guérir: allusions obscènes et réalité de l'interrogation dans la réflexion savante d'antan196
      • L'hydropisie de la femme de Thibaut. Rapprochements avec la nosographie réelle de cette maladie. Exposé étiologique, description symptomatique, classification nosologique et principes thérapeutiques: exactitude de l'information de Molière198
      • Fantaisies thérapeutiques209
      • L'or potable: usage, fabrication, indications210
      • Confections d'or, de perles et de corail. La confection d'hyacinthe: sa composition, ses effets, sa vogue et les accommodements dans le choix des ingrédients212
      • Le tabac: ses vertus prétendues, ses dangers dénoncés215
      • Le vin émétique: composition et préparation, bienfaits supposés et effets observés. Débat sur la promptitude d'action du remède: logique hippocratique ou iatrochimique217
      • Maladie de Lucile, maladie de Lucinde222
      • La cohérence et le parallélisme des trois diagnostics. Leurs ambiguïtés: s'agit-il d'une maladie des viscères remontant au cerveau, ou l'inverse? D'autre part, dès lors que le médecin pour rire diagnostique une affection d'origine amoureuse, faut-il considérer le mal comme entièrement feint ou pour partie véritable? Conclusion d'ensemble222
      • 2 - Le comique de l'imposture: facétie, raillerie, sarcasme229
      • Les facéties du farceur229
      • Philosophie de la farce: s'adapter aux situations et vivre l'heure présente le plus joyeusement possible. Conséquence pour le rire de farce: il est jovial plus que satirique, complice plus que moqueur. Le Médecin volant: un comique de déformation caricaturale imposé par le genre. Relevé de traits: jeux verbaux, auto-ironie plaisante, humour inoffensif ou caricature trop appuyée pour être vraiment incisive229
      • Même registre dans Le Médecin malgré lui, avec plus d'abondance et d'aisance: virtuosité de l'équivoque, concentration des effets comiques autour de la feinte médecine et de la métamorphose du Fagotier en médecin, gauloiserie et grivoiserie, absurdité233
      • Les railleries de l'imposteur238
      • Traits de raillerie émoussés par la convention ou l'excès bouffon de la verve comique: dans Le Médecin volant, les moqueries topiques sur les échecs des médecins; sur leur âpreté au gain; origine de cette dernière réputation. Dans Le Médecin malgré lui, le nombre des pointes s'accroît, visant l'esprit de lucre des médecins, leur impunité en cas de décès des patients; mais il y a la plus de bouffonnerie que de véritable intention satirique238
      • En revanche, la moquerie se fait plus vive dès lors qu'elle touche à la valeur de la science médicale, réputée pour pure charlatanerie: sont brocardés son formalisme, son conservatisme passéiste, son latin de parade, ses effets de manche; mais même cette acerbité paraît avoir pour fonction de donner vie à la fiction plus que de corriger par la fiction les erreurs et les scandales de la vie242
      • Enfin, l'âpreté devient plus nette dans Dom Juan, qui constitue une sorte de répertoire des traits acerbes de la topique anti-médicale245
      • Les sarcasmes de l'impie246
      • Le statut et la fonction de la médecine dans Dom Juan. De la controverse sur la science médicale à la profession d'athéisme, l'enjeu de la discussion entre Sganarelle et son maître transcende la simple satire d'une imposture lucrative. Comparaison avec l'adaptation de cette scène par Thomas Corneille dans Le Festin de Pierre versifié: le délayage du propos anti-médical en émousse l'acerbité et la banalise; de même le souci inopportun de justifier le choix de la défroque médicale par le passé de Sganarelle. Les emprunts de Corneille au Médecin volant et au Médecin malgré lui signalent d'ailleurs un souci de ramener Dom Juan vers le comique inoffensif de la farce. On peut en déduire qu'à l'inverse Molière, lui, n'a amené la discussion à propos de médecine dans Dom Juan que pour faire allusion à la religion246
      • Confirmation de cette hypothèse libertine. On écartera d'abord l'hypothèse d'une influence du scénario Biancolelli sur Molière dans le choix du déguisement médical de Sganarelle: la décision lui en revient bien à lui seul. Or il a profité du thème médical pour tisser le dialogue sur ce sujet de termes empruntés au champ lexical de la croyance. De la discussion entre Sganarelle et Dom Juan se dégage ainsi l'impression d'une défiance globale envers la nécessité de "croire quelque chose dans ce monde". L'analogie entre la défiance envers la religion et envers la médecine invite donc à lire la scène comme un plaidoyer en faveur de la "suspension du jugement" en matière religieuse. Ce que confirme a contrario la perspective métaphysique adoptée par Dorimon et Villiers: leur héros est un blasphémateur, non un sceptique indifférent. Place d'Elvire et du Pauvre dans l'économie de la signification qui se dégage de l'oeuvre: ils jouent le rôle de témoins et martyrs du fidéisme face au scepticisme. Il ne paraît pas que Molière mette en doute la foi du Pauvre ni la conversion de la religieuse. Soucieuse d'autoriser le droit à penser librement pourvu que l'on n'offense personne, son oeuvre suggère plutôt l'alliance entre les honnêtes gens, les esprits droits et probes, touchés ou non par la grâce, croyants ou sceptiques, contre les fanatiques tapageurs des deux camps251
      • 3 - Dom Juan et l'éloge paradoxal de la médecine265
      • L'éloge du tabac et celui de l'émétique s'inscrivent dans la tradition de l'éloge paradoxal, l'un facétieux, l'autre satirique. Ce tour caractérise également la rhétorique de Dom Juan et de Sganarelle dans une bonne part de la comédie. Il colore souvent aussi le traitement joyeux ou railleur du motif médical dans l'oeuvre de Molière265
      • La tradition européenne de l'éloge paradoxal270
      • Brève définition de ses composantes: le pastiche, voire la parodie, et le paradoxe. Un aperçu sur son histoire est tracé par Érasme dans la préface de l'Eloge de la Folie. La tradition antique du genre: l'usage corrosif qu'en font les sophistes; l'usage philosophique qu'en propose Platon: l'éloge paradoxalement sérieux d'un objet dérisoire devient avec lui l'éloge apparemment frivole d'un objet estimable mais méconnu. Lucien, maître du tour spoudogeloion, ajoute aux veines facétieuse et paradoxale une troisième coloration, satirique, à travers le discours d'auto-flagellation d'un adversaire de l'auteur par lui-même. Au total, l'Antiquité promeut une conception critique du tour pseudo-encomiastique, alors que la tradition médiévale pratique une forme d'éloge allégorique, dans le prolongement ou par parodie de l'herméneutique sacrée270
      • La tradition humaniste. L'Eloge de la Folie, modèle absolu du genre, en use sous ses trois formes (facétieuse, paradoxale et satirique) pour les fusionner: Érasme y combine le traitement léger d'un sujet sérieux au traitement faussement pompeux d'un thème frivole. Dom Juan renouera avec cette formule ambivalente: l'éloge paradoxal y contribue à la mise en forme du suspens critique, par dispersion du point de fuite et disparition du cadre de référence dans la discussion sur les valeurs et le sens des choses. La floraison d'éloges néo-latins et l'Amphiteatrum de Dornau, élargissement du tour pseudo-encomiastique au ton des joca-seria. Le tour pseudo-encomiastique au service de la satire et de l'esprit critique dans l'Angleterre des XVIème et XVIIème siècles275
      • Les bernesques italiens et la tradition paradoxale acclimatée au milieu mondain: les Paradossi de Lando. Leur influence sur Rabelais: éloges du pantagruélion et des dettes, préludant à celui du tabac par Sganarelle. Les blasonneurs français et les poètes de cour laudateurs de l'infime. Montaigne et l'éloge de la farcissure et de la capirotade: une évaluation auto-ironique et critique de sa démarche à l'intérieur d'elle-même, et son issue à travers un éloge paradoxal du corps, des plaisirs naturels les plus humbles, comme garantie d'une attache avec la nature exorcisant le péril de la "vanité"280
      • Les quatre veines de l'esprit pseudo-encomiastique au XVIIème siècle en France: satyrique, burlesque, érudite et mondaine. La synthèse que réalisent Les Provinciales, savantes et mondaines, satiriques et galantes: un monument d'ironie paradoxale édifié selon la technique de l'auto-flagellation de l'adversaire. En ressort une conception du ridicule qui se retrouvera chez Molière. L'influence des Provinciales sur la conversion de Dom Juan à l'hypocrisie. La veine érudite: Le Barbon, satire de Balzac. Le tour pseudo-encomiastique chez les libertins. L'influence de ces quatre veines majeures sur le Dom Juan de Molière287
      • Éloge paradoxal et discours médical dans l'oeuvre de Molière296
      • Sganarelle laudateur du tabac et de l'ignorance. Le modèle des harangues facétieuses de Bruscambille. Hypothèse d'une genèse de la tirade du tabac à partir du répertoire des prologues que Molière, orateur de sa troupe, prononçait au lever du rideau. La conversation sur l'émétique, elle, a pu être modelée sur la mécanique des "Questions" tabariniques de tour et de ton facétieux, parodiant la disputatio savante296
      • Répertoire des éloges paradoxaux dans Dom Juan. Principes de classement: éloges facétieux et tendancieux, inconséquents et sérieux, traitant de manière frivole un objet estimable ou l'inverse; posture de l'orateur: ironiste lucide ou victime ridicule de son propre aveuglement sur le sens de ce qu'il prône. L'incertitude maintenue sur la signification facétieuse ou satirique, inoffensive ou tendancieuse, de certains éloges paradoxaux dans Dom Juan favorise l'oscillation du sens et le suspens critique propres à cette comédie. La forme y induit la déception du sens et soumet à la critique toute tentative de s'arrêter à une position définitive sur l'origine et les fins de la nature et de l'homme. Confirmation par la comparaison entre les versions en prose et en vers de la pièce309
      • Médecine et tour pseudo-encomiastique dans l'oeuvre de Molière320
      • Deuxième partie. La mélancolie érotique et l'amour médecin325
      • Les centres d'intérêts variés de L'Amour médecin. Évolution et diversité de l'appréciation portée sur eux: l'oeuvre fut perçue à sa création comme une comédie de circonstance fondée sur des effets de scandale et de spectacle. Sera examinée ici en priorité la mystification pathologique et médicale qu'elle met en scène sous le prétexte d'une maladie d'amour feinte quoique, d'un certain point de vue, véritable327
      • Chapitre premier. De quoi souffrent les jeunes filles331
      • 1 - Les couleurs d'un "simple crayon": présentation de L'Amour médecin335
      • Une comédie de cour335
      • Une écriture chorégraphique: le rôle du jeu, de l'ornementation; l'esthétique de la comédie-ballet335
      • Une satire d'actualité: les médecins masqués, les clefs proposées. Le succès qu'ils rencontrent éclipse auprès des contemporains le reste de l'intrigue339
      • Un impromptu qui fédère des sources variées. Le dénouement du Pédant joué de Cyrano, modèle de la ruse de Clitandre? Unité thématique de l'oeuvre: la feinte et l'illusion comiques341
      • L'illusion comique: le masque et la grimace344
      • Le masque médical, principe d'unité de l'oeuvre, puisé dans une tradition très conventionnelle de la duperie. Sganarelle ou l'autorité tyrannique et aveugle. Lucinde ou la fausse malade. Origines et modèles du stratagème: la tradition du barbon dupé par une ruse qu'a fomentée un couple d'amants; la tradition de la souffrance d'amour déguisée en feinte maladie d'amour. Clitandre médecin par ruse: railleries traditionnelles envers la médecine344
      • Mais outre l'unité que confère à l'oeuvre le masque médical, on doit compter aussi avec l'ambivalence qu'y génère le masque de la feinte maladie. Cohérence des allusions à la mélancolie de Lucinde, qui unissent les trois actes de la comédie: état psychologique au premier, pathologie atrabilaire au second, maladie de l'esprit au dernier. Le caractère original de cette ruse et sa puissance allusive: le masque de la feinte maladie d'amour est modelé sur les traits réels du visage. L'Amour médecin, archétype de la "comédie médicale"350
      • La satire des médecins et de la médecine353
      • La tradition dramatique de la consultation médicale et les traits de satire qui la caractérisent: vrais et faux consultants sur la scène ibérique et italienne. La satire des débats entre consultants, la raillerie envers les mules et la barbe des médecins353
      • La tradition moraliste et les traits polémiques qu'elle nourrit: l'ignorance présomptueuse ou cynique des médecins; médecine et imposture: M. Filerin, avatar de Tartuffe357
      • La topique des querelles médicales: portraits à clefs et débats d'actualité; Clitandre et la médecine "empirique"365
      • 2 - Lucinde hystérique?377
      • La "pathétique" invention de Lisette377
      • La tradition comique de la pâmoison: opilation et suffocation de la matrice. L'hypothèse hystérique377
      • Étiologie: interprétations hippocratique (utérus migrateur) ou galénique (empoisonnement par la semence vénéneuse)379
      • Symptômes: soudaineté de la crise, pâleur, évanouissement, étouffement, mutisme383
      • Thérapie: les remèdes pittoresques, le mariage, la ruse; tradition de l'équivoque gauloise autour du thème de l'opilation hystérique389
      • La fumeuse pathologie des médecins patentés392
      • Des diagnostics apparemment contradictoires, en réalité compatibles: une maladie causée par le désir amoureux, imputable à une hystérie392
      • Étiologie de l'hystérie supposée de Lucinde: rétention d'humeurs spermatiques peccantes393
      • Les vapeurs délétères lésant le cerveau: fusion entre l'étiologie de l'hystérie et le modèle hypocondriaque, sous l'influence de la nosographie de l'épilepsie397
      • Exemples littéraires et médicaux de l'influence exercée par cette définition du mécanisme de l'hystérie comme affection intéressant conjointement la matrice et le cerveau par l'intermédiaire des vapeurs402
      • Conclusion408
      • 3 - Clitandre aliéniste?411
      • Une maladie de l'esprit413
      • Clitandre professe que Lucile est malade de l'esprit. Sous la rupture apparente du raisonnement médical tenu jusqu'alors dans la comédie sur le cas de la jeune fille, ce diagnostic introduit une bifurcation de l'analyse pathologique sans en entamer la cohérence profonde. La notion de maladie de l'esprit au XVIIème siècle: esquisses d'une définition spécifique des maux relevant de l'âme; limites de cette intuition qui se résorbe le plus souvent dans l'image verbale413
      • Un exemple de cette ambiguïté: la nosographie prometteuse mais décevante de Sylvius. Du moins confirme-t-il la voie par laquelle est appelée à passer cette intuition encore incertaine: celle de la mélancolie, qui constitue le lieu d'échange entre le domaine physique et psychique dans l'ancienne anthropologie médicale et morale. Application du modèle à la souffrance amoureuse, trouble du corps dans lequel intervient une perturbation de l'âme421
      • Projection de cette ambiguïté dans le texte de L'Amour médecin: Lucinde est-elle malade de l'esprit ou des esprits? L'incertitude sur ce point souligne la cohérence du raisonnement médical qui tisse l'intrigue comique: Clitandre ne se contente pas d'inverser la hiérarchie des responsabilités partagées par le corps et l'esprit dans la maladie supposée de Lucinde; il opère la synthèse entre les deux options en définissant un cadre large dans lequel désordres des humeurs et de l'esprit interfèrent sans préséance ni primauté427
      • Une révolution de la nosologie433
      • Une confirmation et un prolongement sont offerts à notre lecture par le renouveau historique que connaît l'analyse de l'hystérie au XVIIème siècle sous la pression des découvertes nouvelles (circulation du sang et système nerveux, théorie des vapeurs). Hypothèse de la localisation cérébrale de l'hystérie. Le conflit entre la localisation utérine, avec utilisation des réseaux nerveux pour conduits des vapeurs, et la localisation cérébrale, avec atteinte des esprits animaux perturbant le réseau nerveux. Lange, Lepois, Willis et Highmore433
      • La révolution de la nosographie hystérique et hypocondriaque par Sydenham: deux maladies imaginaires mimant n'importe quelle affection du corps. L'hystérie comme maladie-caméléon, dramaturgie jouée au corps et dans le corps par l'esprit. Audace et conformisme: le modèle nouveau est tracé à partir de l'ancienne nosographie de la maladie mélancolique. L'exemple de la théorie de "l'homme intérieur", lointaine intuition d'une pathologie spécifique de la maladie mentale formulée dans le vocabulaire religieux puis ésotérique utilisé notamment par Paracelse441
      • Clef de la convergence entre cette interprétation savante et le cas des jeunes filles malades par feinte sur la scène de Molière: le modèle médico-éthique de la mélancolie amoureuse452
      • Chapitre second. Splendeurs et misères du mal d'amour457
      • Amour, maladie et médecine de l'Antiquité au siècle classique: la permanence d'une corrélation. Les alternatives inhérentes à ce modèle incertain: assimilation analogique ou effective de l'amour à une maladie; nature indirectement pathogène ou essentiellement pathologique de ce mal; identification de ce mal comme une passion de l'âme répercutant sur le corps ses perturbations ou comme une passion somatique contaminant l'esprit; enfin contamination imputable à un déséquilibre des qualités du cerveau ou à la contagion d'humeurs peccantes d'origine hypocondriaque et séminale459
      • 1 - Les origines d'un malentendu465
      • Maladie érotique et pathologie mélancolique466
      • De la passion amoureuse à l'amour-maladie466
      • Les quatre évangiles de la mélancolie: Hippocrate, Aristote, les Lettres hippocratiques, Galien467
      • Données de la problématique érotico-mélancolique: l'assimilation de l'amour à une maladie, de cette maladie à une mélancolie, de cette mélancolie de l'âme, morbide par analogie seulement, à une affection réellement atrabilaire d'issue éventuellement fatale. Cadre large de cette évolution, ses implications théoriques471
      • La maladie d'amour dans l'Antiquité474
      • Les témoignages littéraires, éthiques et philosophiques en faveur de la médicalisation du mal d'amour: la poésie lyrique (Sappho et Ovide), la tragédie (Euripide et Sénèque), le modèle aristotélicien des passions474
      • Réticences médicales: Arétée et Galien. Naissance du malentendu: en dénonçant le risque de confusion que pourrait provoquer la similitude symptomatique entre mal d'amour et maladie mélancolique, ils fournissent à leur corps défendant un argument en faveur de cette assimilation même477
      • Les deux voies de l'assimilation: la maladie d'amour responsable d'un délire semblable à une démence non fébrile (assimilation symptomatique et métaphorique) ou imputée à une rétention de semence accumulée dans le bas-ventre (assimilation pathologique, concrète)481
      • Conclusion: la pathologie mélancolique et l'herméneutique des passions vont désormais constituer les modèles naturels pour la nosographie de la maladie érotique, en dépit des réticences de la tradition médicale antique486
      • 2 - Genèse et développement du modèle, du crépuscule de l'Antiquité à l'aube de l'Âge classique489
      • L'affection érotique dans la médecine arabe classique et la scolastique médiévale489
      • Avicenne et la conception psychologique et cérébrale du mal d'amour "semblable à une mélancolie": lecture analogique (l'amour comparable à une maladie) et pathologique (l'amour conçu comme une maladie de l'esprit par connivence et implication du corps). À cette conception d'une pathologie d'origine cérébrale, calquée sur le modèle aristotélicien des passions, s'ajoute timidement l'hypothèse attribuant à une pléthore de semence la chute dans la maladie proprement dite. La conception médicale de la maladie d'amour écartelée entre analogie et implication489
      • Arnaud de Villeneuve et la conception scolastique de l'amour héroïque comme "accident" de l'esprit provenant d'une chaleur excessive suscitée à partir des yeux dans le coeur et le cerveau par les esprits animaux, liée à une erreur de la vertu estimative. L'interprétation de la maladie d'amour par la pléthore spermatique est en revanche peu retenue par les clercs médiévaux, qui professent tous l'incidence de la cogitation véhémente dans la perturbation accidentelle des qualités du coeur et du cerveau499
      • Bilan: entre l'Antiquité et la fin du Moyen Âge, l'herméneutique de la maladie amoureuse s'est constituée au sein d'une alternative qui opposait une psychologie de l'image à une physiologie du besoin. L'évolution promise à cette alternative passe par le modèle mélancolique510
      • "Éros" et "Antéros" humanistes511
      • Ficin et la théorie néoplatonicienne du mal d'amour. Tout amour charnel est potentiellement et essentiellement maladif; le mal intéresse de manière conjointe le corps et l'esprit, comme la mélancolie. L'empoisonnement par la contagion oculaire, facteur d'unification entre maladie de l'esprit et du corps sous l'égide de la mélancolie atrabilaire. Confirmation de cette unification par Valleriola qui, dans la lignée d'Avicenne, Arnaud et Ficin, offre la description concrète d'un cas d'interaction morbide entre corps et âme chez un malade d'amour, suggérant par l'exemple qu'une maladie de l'esprit peut provoquer une affection pathologique du corps511
      • Fregoso présente l'expression théorique de l'alternative entre les deux origines, psychique et physiologique, de la maladie amoureuse. S'exprime dans son traité l'intuition du pouvoir immédiat que possède l'esprit de précipiter le corps dans la maladie par la production d'humeurs atrabilaires. Conclusion: réflexion sur les motifs éthiques de la convergence conceptuelle entre la doctrine pathologique de la maladie d'amour et de la mélancolie521
      • 3 - La mélancolie érotique au XVIIème siècle531
      • Les traités de pathologie érotique532
      • Du Laurens médecin de l'amour-maladie: lecture ascendante et descendante de l'interférence entre corps et esprit532
      • Aubery médecin et moraliste: superposition entre une psychophysiologie du besoin et une pathologie du désordre sensuel; oscillation entre une rhétorique de l'analogie (l'amour comme affection de l'âme) et de l'implication (l'amour comme cause de maladie du corps)534
      • Ferrand et Burton: l'érudition composite au prix de l'incohérence nosographique. Exemples de l'oscillation apparente de Ferrand entre la morbidesse amoureuse entendue par analogie ou par implication; entre l'amour maladif et mélancolique par nature et l'amour cause de maladie mélancolique impliquée. Hypothèse sur la logique profonde qui gouverne ces apparentes contradictions: celle de l'opposition entre l'amour éthéré, modéré et raisonné, et l'amour charnel, démesuré et sensuel, par essence morbide s'il n'est pas toujours en pratique mortel. La doctrine de la mélancolie permet de conférer une unité à cette conception de la morbidesse érotique comme processus évolutif collant du simple désordre d'âme à la ruine de la santé. Rapprochements avec la doctrine exposée par L'Amour médecin542
      • Burton ou l'élaboration d'un "verbe mélancolique" aux prétentions ontologiques552
      • Conclusion: la combinaison entre les deux alternatives - l'amour comme maladie de l'âme (analogie) ou maladie du mixte corps-esprit (pathologie) - finit par s'opérer au XVIIème siècle dans le creuset du modèle mélancolique et à la faveur de son étiologie trinitaire554
      • Maladie du corps ou de l'esprit?555
      • La maladie d'amour comme mélancolie de type hypocondriaque: Zacchia et alii. L'hypothèse "spiritualiste" et psychologique: l'amour comme maladie de l'âme ou du cerveau. La fusion entre les deux herméneutiques555
      • La question de l'origine psychique ou physique de la maladie érotique est clairement posée par Marcucci qui affirme la nécessaire intervention de la physiologie atrabilaire ou de la température froide et sèche dans le processus et par Meyssonnier qui, appuyé sur la théorie cartésienne attribuant à la conarion le rôle d'intermédiaire entre le corps et l'esprit, va au plus près de la thèse qui sera développée par Sydenham et qui attribue à l'esprit le pouvoir de susciter l'apparence d'une affection morbide trompeuse dans l'organisme perturbé par la défaillance des facultés mentales558
      • Continuité et renouveau563
      • Bilan sur l'histoire du concept de "maladie d'amour": les deux voies majeures de l'herméneutique de l'affection érotique, leurs interférences, leur conjonction sous l'égide de la mélancolie. Applications et implications comiques du modèle: maladies du désir d'amour et du désir d'amant sur la scène de Molière563
      • Bilan sur le renouveau du concept qui se lit dans l'oeuvre de Sydenham après avoir été esquissé par Fregoso dans une rhétorique encore très empreinte d'images analogiques. Sources et modalités de ce renouveau; ses relations avec l'écriture dramatique570
      • Chapitre troisième. Dramaturgie de l'amour malade et médecin575
      • 1 - La dramaturgie de l'amour malade579
      • Naissance d'une topique579
      • Fondations antiques: Antiochus et Stratonice, Théagène et Chariclée579
      • Variations médiévales: Jehan et Blonde, Jacquet et Jeannette583
      • Les folies d'Espagne587
      • Complaisance envers les folies d'amour dans la littérature ibérique des XVème et XVIème siècles, emprunts à la légende d'Antiochus et Stratonice, enrichis par les deux modèles qu'offrent Amadis et le Roland furieux587
      • La peinture de la maladie amoureuse dans l'oeuvre de Tirso et de Lope. Lucrecia entre vrai et faux délire amoureux dans La Fingida Arcadia. Le diagnostic de folie amoureuse dans El Amor mèdico. El Acero de Madrid: un modèle d'évocation dramatique de la mélancolie amoureuse, une synthèse nosographique bien informée593
      • La maladie d'amour à l'italienne601
      • Souvenirs et traces dans la littérature italienne de la feinte maladie amoureuse mise en scène par le Medico volante. Littérature facétieuse et mal d'amour: le Lasca. Le motif de La Finta Pazza601
      • L'hôpital des fous, singulièrement des fous d'amour, dans la littérature de l'Europe humaniste. Échos affaiblis dans la littérature française605
      • La maladie d'amour dans la littérature française du XVIIème siècle610
      • Pichou et Bouscal héritiers comiques de Don Quichotte et des fureurs amoureuses de Cardenio. Rotrou, Quinault, Tristan et les deux Corneille, héritiers tragiques ou tragicomiques du pathos ou de la pathologie érotico-mélancolique610
      • "Olynthe", nouvelle de Sorel donnée pour source de L'Amour médecin, constitue plus un relais qu'un modèle de cette comédie: le traitement des thèmes de la maladie érotique y est exemplaire de la topique morale et médicale la plus répandue sur le sujet. Artémise et Poliante de Boursault: occultation du modèle érotico-mélancolique qui demeure présent mais latent. Molière à la charnière entre l'ancienne conception inspirée de l'herméneutique mélancolique et une nouvelle interprétation du délire d'imagination616
      • Conclusion622
      • 2 - La cure du mal d'amour ou les leçons de la nature625
      • L'opposition apparente entre la cure allopathique prônée par les quatre médecins de Lucinde et la thérapie homéopathique appliquée par Clitandre, médecin de l'esprit. Leur complémentarité latente dans l'optique de la doctrine médicale ancienne625
      • Des "cures merveilleuses"626
      • Sous la contradiction apparente entre les conseils thérapeutiques prodigués par les quatre médecins de la Faculté, la cohérence d'une attaque en règle contre le mal par étapes successives et combinées626
      • La cure de la mélancolie par la saignée; par la purgation; par les "altératifs, confortatifs et évacuatifs"631
      • Imbrication entre les effets psychologiques et physiologiques de ces traitements639
      • La position de Clitandre par rapport à la stratégie thérapeutique de ses quatre "confrères": il en inverse l'ordre des priorités, il la complète et la parfait642
      • Clitandre homéopathe?645
      • Principes de l'intervention de Clitandre: apaiser l'esprit dément par une ruse qui feint de consentir au délire. La tradition médicale des mystifications destinées à pacifier l'esprit en proie au délire mélancolique645
      • Leur mode de fonctionnement et leur visée thérapeutique: guérissent-elles entièrement l'esprit ou préparent-elles seulement l'action des médicaments de la pharmacopée? Trois interprétations de leur effet: pure diversion sans résultat thérapeutique, combinaison de la ruse avec une médication concrète et agissante, cure de l'imagination par la fiction qui restitue l'esprit à la réalité651
      • Le modèle de cette thérapie: la purgation passionnelle (la catharsis du théâtre tragique) calquée sur l'action des médicaments évacuatifs. Similitude de fonctionnement et d'effet entre purgation médicale et théâtrale, rapprochement entre les passions guéries par la catharsis théâtrale et celles qui caractérisent la maladie mélancolique (crainte et pitié / tristesse et crainte). Arguments corollaires en faveur de ces rapprochements. De l'homéopathie (complicité du semblable) à l'homo-pathie (mise en scène de l'identique à des fins curatives): le fou comme acteur sans le savoir. Application du modèle au dénouement de L'Amour médecin656
      • Le père coupable664
      • Sous couvert de mettre Lucinde délirante en contradiction avec elle-même, la médecine pour rire confronte aux contradictions de son propre délire possessif Sganarelle abusé par la saynète que lui joue Clitandre, médecin de son esprit brouillé, de son âme aveuglée par les préjugés de l'autorité et de l'égoïsme paternels664
      • La signification éthique de l'oeuvre se résorbe dans sa dramaturgie: un échelonnement de perturbations résolues par une superposition de masques et de grimaces667
      • Conclusion. La maladie d'amour imaginaire673
      • Mélancolie amoureuse et comédie673
      • Genèse et logique du modèle dramatique issu de la rencontre entre la (fausse) maladie d'amour et la (feinte) médecine de la mélancolie érotique. Justification de la similitude entre la réalité latente et le masque choisi pour la conjurer. Puissance d'expression conférée à la comédie par l'usage du modèle673
      • La philosophie comique des pièces de Molière dérivées du canevas du Medico volante: combat contre le rigorisme moral, mais interrogation, aussi, sur les élucubrations de l'imagination chimérique ou obsessionnelle676
      • Illusion, imposture et imagination680
      • Lumières apportées par ces analyses à l'étude des comédies écrites durant la querelle du Tartuffe: une dramaturgie de l'imagination égarée680

  • Origine de la notice:
    • FR-751131015 ;
    • BPI
  • Disponible - 840"16" MOLI 5 DA

    Niveau 3 - Langues et littératures

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