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Le Cyrano de Bergerac de Jacques Prévot

dans Grihl / CRH - EHESS


  • Éditeur(s)
  • Date
    • 2022-08-30T02:00:00Z
  • Notes
    • Dans son dernier ouvrage consacré à Cyrano, J. Prévot se borne, généralement, à répéter ce qu’il a exposé en 1977-1978. Pour ce qui est de la biographie, des pans entiers lui échappent ou sont laissés dans l’ombre, dont particulièrement deux relatifs à la religion et à l’armée. La mise en lumière de la lignée maternelle de l’écrivain a révélé, en 2000, un milieu de dévots très influents dans la Compagnie du Saint-Sacrement et, plus récemment, la découverte de l’allégeance du grand-père paternel au protestantisme (même pas mentionnée) montre une tension idéologique au sein de la famille et éclaire d’un jour nouveau les commentaires répétés de Cyrano sur les dogmes de l’église catholique. Sur la vie militaire de l’auteur, les maigres informations fournies datent de 1858 (Lacroix) et de 1921 (Lachèvre) ; mais nous savons aujourd’hui que Cyrano a entretenu des relations suivies avec son capitaine aux Gardes du roi, Alexandre de Biran de Castegeloux (le « Carbon de Casteljaloux » de Rostand), domicilié soit à Clamart, tout près de Mauvières, soit à Paris, rue de la Verrerie où l’on trouve aussi Le Bret et Cyrano dès 1649 ; Castelgeloux était très lié à Jean de Cuigy, le notaire secrétaire du roi qui signa les lettres patentes de l’édition posthume des Etats et Empires de la Lune, domicilié dans le même quartier, ainsi que son ancien ami Tanneguy Regnault des Boisclairs, dernier protecteur de Cyrano. Il y a là tout un réseau d’amis influents et de longue date, qui tissent les fils d’une vie jusqu’ici présentée comme totalement décousue. Quant à l’histoire des textes, et particulièrement la « bibliographie matérielle », Prévot soit ignore totalement soit ne comprend pas en quoi consiste une censure après la publication ou « cartonnage » (Lettres de 1654 puis dédicace et préface, signées Le Bret, des Etats et Empires de la Lune en 1657) et ne voit pas que, pour éviter au roman de Cyrano une autre censure embarrassante et onéreuse, les « publicateurs » (Le Bret, Charles de Sercy, Jean de Cuigy et peut-être le dédicataire Regnault des Boisclairs) ont très probablement eux-mêmes coupé et révisé le texte. La plume de Le Bret se trahit partout, avec sa pléthore de « de sorte que », et une variante de 1657, qu’une minute de notaire (vive l’interdisciplinarité !) permet de dater de 1656, se révèle donc posthume. Autre réseau, mais un peu le même, grâce auquel la vie de Cyrano et celle de ses œuvres se matérialisent et s’étoffent. Une analyse méticuleuse des manuscrits aurait peut-être permis au critique d’y voir clair : la nature composite du texte de 1657, que Prévot a attestée malgré lui, relance la question de la véracité de Le Bret en ce qui concerne sa mission de publier le roman. Mais tout cela passe inaperçu et le recours répétitif à « un » censeur imaginaire permet au critique de tout et de ne rien expliquer. Pour finir sont brièvement rappelées ici deux fausses attributions, répétées depuis 1978 : la substitution d’un personnage du roman qui fait dire à un adolescent tout le discours d’un professeur d’académie sur l’atomisme matérialiste et athée, et l’attribution à Cyrano de sept mazarinades de 1649 que Prévot continue à soutenir, bien qu’un test linguistique, inspiré par les travaux de Harold Love, ait démontré en 2004 l’invraisemblance de ces attributions. Mais Prévot ne le mentionne pas : soit on ignore soit on met sous le boisseau…
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