L’écriture en langue française pour Assia Djebar a toujours constitué une aporie : comment, depuis les sons berbères ou arabes, traduire dans la langue de l’autre, de l’ex-colonisateur, les appels, plaintes, sanglots, espoirs et souffrances des siens, des ancêtres ? Comment sauvegarder dans la langue française les scories, les particularités de la langue d’origine ? Car Djebar est précisément à l’écoute du différentiel de la langue, des langues : elle fait entendre sous la langue d’écriture le souffle, le rythme des langues maternelles, et élabore par conséquent dans ses œuvres une véritable « poétique du traduire », pour citer Henri Meschonnic.