La souffrance physique semble absente de l’œuvre de Lucain, alors même que La Pharsale regorge de scènes macabres et de combats sanglants. à peine est-elle suggérée par quelques notations lexicales, et les animaux gémissent plus que les humains. On peut alors s’interroger sur les raisons de cette lacune paradoxale : Lucain a-t-il eu l’intention de parodier les codes épiques en vigueur, poussant jusqu’au grotesque un héroïsme devenu invraisemblable ? Veut-il faire voir, à travers un dispositif spectaculaire, le déchiquetage des corps et des chairs, plutôt que faire entendre la douleur qui en résulte ? Subit-il l’influence des Stoïciens ? Dans ce cas, il est nécessaire de surmonter la souffrance physique, voire de s’enquérir d’un mal plus grand, un mal métaphysique qui, en pleine guerre civile, scelle « les funérailles de l’univers » (VII, 617).