Une époque haute en couleur, remplie de bruit et de fureur, fertile en exploits héroïques accomplis parfois par des femmes : telle est l'image de la Fronde dans la mémoire collective des Français, nourrie par le roman d'Alexandre Dumas, Vingt ans après. On en retient habituellement quelques épisodes particulièrement dramatiques comme les barricades de Paris (août 1648) ou la bataille du faubourg Saint-Antoine (juillet 1652).

Celui qui tente de dépasser cette impression superficielle, de découvrir le sens de cinq années de troubles (1648-1653) se trouve, de prime abord, déconcerté. Car c'est un foisonnement déroutant d'événements enchevêtrés, de rebondissements incessants, de retournements brutaux de situation qui constitue la trame même de la crise.

Ce désordre apparent n'interdit pas de «penser la Fronde», selon le mot d'un historien d'aujourd'hui. Réaction de la société française à l'édification de l'Etat moderne voulu par Louis XIII et Richelieu, elle s'enracine dans la minorité de Louis XIV, qui n'a pas cinq ans à son avènement. A deux reprises, elle contraint à l'exil le cardinal Jules Mazarin, premier ministre de la reine régente Anne d'Autriche et parrain du roi. Elle tire sa gravité de la conjonction de trois fléaux : la guerre et son cortège d'exactions, la disette due aux mauvaises récoltes, les épidémies. Elle échoue finalement parce que les Français, recrus d'épreuves, aspirent à un pouvoir royal fort, seul capable de faire régner l'ordre et la paix. Elle a engendré la monarchie absolue et personnelle du Roi-Soleil.