Espaces forestiers et industrie verrière XVII^e-XIX^e siècle

En ces temps antérieurs à la révolution industrielle, le bois reste un produit éminemment stratégique, ressource vitale pour les communautés, bois de construction et de chauffe pour les villes, énergie des forges et des fours verriers. Comme de nombreux espaces forestiers, les forêts du Laonnois, aux confins de la Picardie et de la Champagne, comme celles de Saint-Gobain, de Coucy ou de Vauclair, font l'objet d'âpres rivalités.

Propriétaires et forestiers s'allient donc pour tirer au mieux profit du nouvel « or vert », en orientant la production ligneuse en fonction des débouchés, quitte à évincer les populations locales de l'accès au bois. Jean-Baptiste Colbert, alors intendant du cardinal Mazarin, fait ici ses premières armes aux côtés du lieutenant général des Eaux et Forêts, Louis de Froidour, pour expérimenter les réformes mises en oeuvre à l'échelle du royaume en 1661 et 1669.

Si les marchands de la capitale parviennent un temps à étendre leur aire d'approvisionnement, l'industrie triomphe dans cette lutte pour la ressource. Pays de vieille tradition verrière, le Laonnois est marqué par l'installation de la Manufacture royale des glaces, en 1692, à Saint-Gobain. Vers 1770, cet établissement est celui qui consomme le plus de bois en France, autour de 30 000 stères par an. Les forêts laonnoises sont bien devenues des « forêts d'industrie ».

Loin d'une vision mythique du passé, cet ouvrage nous conduit à découvrir une véritable histoire de l'environnement, dans un dialogue constant entre l'action humaine et les forces de la nature. À partir d'une étude minutieuse des peuplements forestiers, ce sont des paysages aujourd'hui disparus qui émergent à nos yeux.