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Livre numérique

Valvèdre

Auteur(s) : Sand, George

  • Éditeur(s)
  • Date
    • 2020
  • Notes
    • George Sand (1804-1876) "Des motifs faciles à apprécier m’obligeant à déguiser tous les noms propres qui figureront dans ce récit, le lecteur voudra bien n’exiger de moi aucune précision géographique. Il y a plusieurs manières de raconter une histoire. Celle qui consiste à vous faire parcourir une contrée attentivement explorée et fidèlement décrite est, sous un rapport, la meilleure : c’est un des côtés par lesquels le roman, cette chose si longtemps réputée frivole, peut devenir une lecture utile, et mon avis est que, quand on nomme une localité réellement existante, on ne saurait la peindre trop consciencieusement ; mais l’autre manière, qui, sans être de pure fantaisie, s’abstient de préciser un itinéraire et de nommer le vrai lieu des scènes principales, est parfois préférable pour communiquer certaines impressions reçues. La première sert assez bien le développement graduel des sentiments qui peuvent s’analyser ; la seconde laisse à l’élan et au décousu des vives passions un chemin plus large. D’ailleurs, je ne serais pas libre de choisir entre ces deux méthodes, car c’est l’histoire d’une passion subie, bien plus qu’expliquée, que je me propose de retracer ici. Cette passion souleva en moi tant de troubles, qu’elle m’apparaît encore à travers certains voiles. Il y a de cela vingt ans. Je la portai en divers lieux, qui réapparurent splendides ou misérables selon l’état de mon âme. Il y eut même des jours, des semaines peut-être, où je vécus sans bien savoir où j’étais. Je me garderai donc de reconstruire, par de froides recherches ou par de laborieux efforts de mémoire, les détails d’un passé où tout fut confusion et fièvre en moi comme autour de moi, et il ne sera peut-être pas mauvais de laisser à mon récit un peu de ce désordre et de ces incomplètes notions qui furent ma vie durant ces jours terribles. J’avais vingt-trois ans quand mon père, professeur de littérature et de philosophie à Bruxelles, m’autorisa à passer un an sur les chemins ; en cela, il cédait à mon désir autant qu’à une considération sérieuse. Je me destinais aux lettres, et j’avais ce rare bonheur que ma vocation inspirât de la confiance à ma famille. Je sentais le besoin de voir et de comprendre la vie générale. Mon père reconnut que notre paisible milieu et notre vie patriarcale constituaient un horizon bien court. Il eut la foi. Il mit la bride sur le cou du cheval impatient. Ma mère pleura ; mais elle me cacha ses larmes, et je partis : hélas ! pour quels écueils de la vie morale !"
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    • Français
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    • copyrighted
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