Le but de cet article est de questionner, avec Chaïm Perelman notamment, la place et le statut du doute dans la pensée conspirationniste afin d’en souligner les ambiguïtés. Il s’agit plus encore de reconsidérer, à la lumière du triptyque doute-évidence-critique, le type d’argumentation et le fond topique qui caractérisent cette pensée-là. Alors que le doute envahit tout l’espace social – car le monde n’est qu’apparences trompeuses ; le mensonge est partout –, il en vient à quitter totalement celui du discours à l’intérieur duquel, justement, on ne doute pas. En effet, l’évidence y fait loi. Partant, l’entreprise critique, qui structure et nourrit la dénonciation du complot, se trouve détournée de sa fonction initiale et de son esprit.