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Le fonds ethnographique des réfugiés grecs d’Anatolie : questions d’histoire et d’historiographie

dans Laboratoire d’ethnologie et de sociologie comparative (LESC)

Auteur(s) : Balta, Evangelia

  • Éditeur(s)
  • Date
    • 2024-04-12T02:00:00Z
  • Notes
    • Le fonds ethnographique des réfugiés grecs d’Anatolie : questions d’histoire et d’historiographie. En Grèce, par le mot « réfugiés » (en grec prosfyges), on entend toujours et exclusivement les 1 200 000 Grecs d’Asie Mineure et de Thrace qui arrivèrent sur le territoire grec en 1922 après la défaite de l’armée grecque en Asie Mineure, puis, de 1923 à 1925, dans le cadre de l’Échange des populations. Le texte du Traité de Lausanne qualifie ces populations d’« émigrants ». Le qualificatif « réfugiés » est associé à la Catastrophe d’Asie Mineure et à l’Échange des populations, qui a définitivement sonné le glas de la politique d’irrédentisme et d’expansion de l’État grec moderne, de ce qu’on appelle, en d’autres termes, la Grande Idée. De ce point de vue, les réfugiés sont le symbole du martyre résultant d’un échec national dans la rhétorique qui s’est développée dans l’historiographie grecque : ils sont les héros et les victimes de la catastrophe et du déracinement. En même temps, ils sont le symbole-même de ces précurseurs qui ont travaillé au regroupement de la Grèce moderne, puisque l’on considère que leur réhabilitation et leur réintégration y a très largement contribué. Les idéologies et stéréotypes qui se sont formés et installés dans le corps de l’historiographie ont d’abord été le produit de la charge que provoquait, et continue à provoquer, l’événement même, tragique, de la défaite et de l’exode qui suivit ; ensuite, celui du difficile processus d’apaisement progressif des secousses provoquées dans la société grecque par l’intégration des réfugiés. D’autres paramètres sont cependant aussi intervenus. Ce qu’il est important de souligner, c’est que la caractéristique principale de l’historiographie nationale relative à la question des réfugiés consiste dans l’absence d’examen de leur passé, et par conséquent dans le silence sur toutes les particularités ethniques, sociales, culturelles et linguistiques qui étaient les leurs ou, pour le dire autrement, dans le silence sur leur identité propre. L’historiographie nationale s’est pleinement alignée sur la politique de l’État grec, qui considérait la population réfugiée comme un ensemble uniforme et qui, comme telle, l’a intégrée aux populations indigènes (nées sur le territoire national), en choisissant d’ignorer leurs particularités sociales et culturelles. Ce n’est pas un hasard si une grande partie des historiens et des hommes politiques a toujours mis en avant, comme contrepartie de la Catastrophe, l’homogénéisation réussie de la population de l’État grec. Très récemment, des études, surtout d’anthropologie sociale, cette science de l’altérité culturelle, ont démontré la multiplicité des pans de l’identité réfugiée et ont retracé à l’aide d’exemples le rôle de l’idéologie nationale grecque dans la disparition de l’identité particulière représentée par les réfugiés dans l’espace qui les a accueillis. Cette absence d’intérêt pour le passé des réfugiés est contrebalancée par l’initiative innovante de Melpo et Octave Merlier, fondateurs de ce qui deviendra le Centre d’études d’Asie Mineure qui, immédiatement après la Catastrophe d’Asie Mineure, se tourne vers l’étude systématique de la civilisation « populaire » des réfugiés.
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