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L’islam au sud du Sahara. Une saison orientaliste en Afrique occidentale

dans Éditions de l’EHESS


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    • 2016-12-20T01:00:00Z
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    • RésuméL’Afrique occidentale française a connu une « saison orientaliste », qui couvre une période allant des années 1890 aux années 1920. L’hypothèse a été émise d’une influence déterminante des modèles de l’« École d’Alger » et des Bureaux arabes. L’article relativise cette hypothèse « diffusionniste » et montre plutôt comment, passé le moment des premiers influx venus du Maghreb, un orientalisme proprement « sénégalo-soudanais » se met en place à l’initiative de trois hommes, Houdas, Delafosse et Gaden, qu’une commune passion pour l’érudition textuelle et les dictionnaires et un intérêt personnel pour les cultures africaines réunissent. Cette « saison orientaliste » fut d’abord l’entreprise volontaire de ces trois acteurs coloniaux motivés, une conjonction singulière qui n’a pas eu de continuateurs immédiats. Plus encore que les institutions algériennes, c’est l’École des Langues orientales de Paris qui apparaît comme une matrice commune.Ce groupe savant considère alors le champ subsaharien, non comme une périphérie, mais comme une province culturelle particulière avec sa propre centralité. « Les populations, auxquelles on est tenté de refuser toute initiative en matière de progrès, ont une civilisation propre qui ne leur avait pas été imposée par un peuple d’une autre race […] » (Houdas 1898). La théorie de l’« islam noir », au début du xxe siècle, est une formulation allant dans le même sens, même si ce groupe n’en est pas l’auteur direct. Cette théorie, qui vise à couper l’islam subsaharien des tuteurs arabes, vise tout autant à autonomiser l’étude de cet islam par rapport au monopole alors exercé par les tuteurs orientalistes du Maghreb. Les tenants de cette revendication d’autonomie scientifique cherchent à promouvoir une revalorisation culturelle des sociétés subsahariennes, une attention aux textes locaux comme instruments d’habilitation d’une histoire et d’une ethnographie de ces sociétés, et l’adoption de concepts adaptés à ce terrain. Cependant, ce décentrement du savoir islamologique accumulé au Maghreb ne va pas de soi, aussi bien pour les arabisants du Maghreb que pour les ethnologues de l’Afrique subsaharienne. L’action de ce groupe savant se distingue, en outre, de l’expertise proprement coloniale d’« Affaires musulmanes », incarnée, entre autres, par Paul Marty. Une telle expertise, qui tient parfois lieu de bibliothèque de référence, à défaut d’une bibliothèque orientaliste diversifiée, a aussi servi de repoussoir, en rendant l’objet « islam » suspect — aussi bien aux yeux des chercheurs de l’époque qu’à ceux de la période des indépendances. Cette littérature de surveillance a contribué à entretenir l’idée que la « question islamique » relevait d’autres paradigmes que ceux des « Études africaines ».La fin de l’article met en perspective la chaîne des héritiers, du côté francophone, notamment, en un premier temps, dans le domaine des études peules, et, du côté anglophone, par la relève qui s’opère dans le catalogage extensif de manuscrits subsahariens.Cette reconnaissance des chaînes de transmission jusqu’à l’époque actuelle, ainsi que le nouveau transfert qui s’opère du côté africain (Hampâté Bâ), témoigne des liens et des ruptures qui existent entre cette première « saison orientaliste » et celle qui se développe, de façon multiforme et plus éclatée, à partir des années 1960.
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