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Architectures et nations. Le cas du Schleswig au regard d’autres régions frontalières en Europe

dans Ministère de la Culture

Auteur(s) : Dragsbo, Peter

  • Éditeur(s)
  • Date
    • 2019-03-06T01:00:00Z
  • Notes
    • L’analyse de l’architecture dans cinq régions frontalières d’Europe semble suggérer que les rapports entre nation et nationalité d’un côté, et architecture de l’autre, présentent des ressemblances et des différences très intéressantes. Ainsi, le Schleswig et la Lorraine, dans leurs divisions nationales, ont vu émerger un style architectural alternatif, en réaction aux politiques architecturales allemandes dominantes. À la différence du Schleswig, les architectes d’inspiration française ont choisi un style nostalgique « vieux Paris », tandis que le mouvement danois, dans le Schleswig du Nord, est resté proche de l’architecture danoise de son époque. Toutefois, aucune des deux parties de la Lorraine n’a développé un style vernaculaire distinct. Le Schleswig et l’Alsace ont vu se développer en parallèle un style vernaculaire, accepté par tout le monde, même si le Heimatstil du Schleswig était toujours considéré de tendance allemande ou de tendance danoise par les deux groupes nationaux. En Alsace, le style vernaculaire exprimait un désir largement partagé d’autonomie. Si nous nous tournons vers Posen (Poznan) et la Prusse de l’Ouest et vers le Tyrol du Sud, nous constatons qu’aucun des mouvements irrédentistes de ces régions ne s’est préoccupé d’architecture. Leurs luttes s’attachaient à d’autres priorités : avant tout la langue, la propriété foncière et la présence publique. Les politiques architecturales allemandes, et surtout le romantisme national de l’Empereur Guillaume II et de son architecte Franz Schwechten, peuvent être comprises comme une tentative de résoudre le problème des différences historiques et culturelles au sein du Reich. Les manifestations du style wilhelmien furent particulièrement importantes dans les « forteresses frontalières » de Metz et de Posen. Niels Wilcken a interprété ce mécanisme comme l’expression d’une revendication de pouvoir douteuse dans des lieux où ce pouvoir était contesté. En dépit des frontières et des divisions nationales, toutefois, il ne faut pas négliger le puissant courant transversal des grands mouvements de l’architecture européenne, ni l’influence des académies d’architecture. Le régionalisme de l’Allemagne du sud a pu étendre son influence depuis l’académie de Munich en Bavière mais également en Autriche, dans le Tyrol et en Alsace. De même, le néo-classicisme vu à Strasbourg dans les années précédant la Première Guerre mondiale est un mouvement développé d’abord dans les académies de Stuttgart et de Karlsruhe et il est resté le style dominant sur les deux rives du Rhin jusqu’à la Deuxième Guerre. De manière similaire, le Heimatstil du Schleswig, fusionné avec le Bedre Byggeskik (style danois), fut employé partout jusqu’après la Deuxième Guerre. En regardant, enfin, cette architecture frontalière en tant que patrimoine, il faut se rappeler que chaque nation était responsable du patrimoine à l’intérieur de ses frontières, quelles que soient les origines nationales des créateurs des bâtiments et des monuments. En fait, le maintien d’un patrimoine « autre » devrait non seulement être accepté mais plus encore, vivement encouragé. La conscience de l’importance d’un patrimoine « étranger », susceptible d’éclairer une histoire et une culture « indigène », est capitale, et devrait faciliter une compréhension authentique de tous les partis. Les chercheurs, les services patrimoniaux et les historiens partagent une responsabilité dans la mission de faire des patrimoines nationaux un patrimoine commun.
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