Entre 1940 et 1944, dans la France occupée, plus d’un millier de monuments et de sculptures ont été retirés de l’espace public puis fondus afin de servir à l’industrie de l’armement allemande. La perte du patrimoine national s’avère être une question politique épineuse, qui a suscité différentes interprétations dans le débat public de l’époque comme dans l’historiographie. Dans cette perspective, le livre d’artiste La mort et les statues (1946), publié par Jean Cocteau et Pierre Jahan, représente un document d’époque unique, qui aborde l’« autre » côté de la destruction comme une perte sans précédent, absolue. Il s’agit ici d’analyser le rôle endossé par le médium photographique dans un commentaire historique au ton personnel, et la façon dont il fait parler l’« invisible » de la destruction.