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Qu’y-a-t-il dans un refus ? Notes méthodologiques et éthiques d’une ethnographie des soins de santé mentale dans les zones rurales du Ghana

dans IFRA-Nairobi


  • Éditeur(s)
  • Date
    • 2024-07-03T02:00:00Z
  • Notes
    • Sur la base de quinze mois de travail ethnographique sur le terrain, mené entre 2013 et 2022, sur la façon dont sont vécues la folie et les pratiques de soins de santé mentale dans le sud-ouest rural du Ghana, je propose dans cet article de prendre comme point de départ l’épisode spécifique du refus des parents de Fadhila – une jeune fille que j’avais rencontrée pour la première fois dans l’unité psychiatrique où elle avait été diagnostiquée comme « psychotique » – à consentir à l’enregistrement d’une interview avec moi. Le refus de Fadhila et de sa famille était motivé par les instructions strictes que leur avait donné le guérisseur traditionnel qui s’occupait de Fadhila : entre autres, Fadhila ne devait pas s’approcher d’un appareil électronique et sa famille estimait donc qu’il était risqué d’enregistrer une interview dans sa maison. Le refus avait trait au fait que Fadhila était une « patiente », tout autant qu’il avait trait à un autre refus : celui des médicaments et de la psychiatrie. En fait, le refus était lié aux esprits, les esprits qui prenaient parfois possession de Fadhila et qui, d’après elle, les membres de sa famille et les experts traditionnels qu’ils avaient consultés, cherchaient à faire d’elle une guérisseuse. Le refus, cependant, représentait peut être aussi une manière polie et indirecte de « retirer le consentement », pour reprendre le jargon des formulaires de consentement éclairé et des comités d’évaluation éthique. Bien que Fadhila et sa famille n’aient cessé de m’inviter chez eux, de m’accueillir chaleureusement à chaque occasion et de discuter avec moi de nombreuses choses, y compris de l’« état » de leur fille, cet épisode de refus m’a poussée à reconsidérer les limites du consentement formel et la nécessité de le remettre en question et de le rétablir sans cesse. Paradoxalement, la bureaucratie des processus d’« autorisation éthique » dans le monde universitaire peut parfois contribuer à éliminer cette dynamique complexe. Grâce à l’analyse de cet épisode ethnographique à la lumière du puissant concept de refus ethnographique introduit par Audra Simpson, je propose une réflexion sur les implications éthiques et méthodologiques qui résultent du fait de considérer les personnes comme des « sources » dans les ethnographies de la folie et de la santé mentale.
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