Au début du XXe siècle sont apparues pour la première fois dans la classification nosologique de Charles Bouchard les «maladies infectieuses», désormais considérées comme entités morbides à part entière liées par l'étiologie. L'émergence de ces pathologies spécifiques est directement liée au triomphe de la théorie des «germes» dont l'analyse par les historiens des sciences a essentiellement privilégié les aspects théoriques d'une part et le rôle de Louis Pasteur et de son Institut d'autre part. Mais qu'en fut-il du quotidien des médecins ? La découverte des microbes et leur inventaire a posé autant de questions qu'elle en a résolu et les praticiens ont dû articuler ces nouvelles données à leurs pratiques cliniques. Protagonistes des débats sur l'étiologie des maladies, en première ligne de la «traque» du germe, responsables du diagnostic et de la thérapeutique, ils ont créé leur propre bactériologie clinique.

L'Invention des maladies infectieuses expose cette émergence progressive, à tâtons et parfois dramatique, d'une nouvelle perception de la maladie et du corps malade par le médecin, l'apparition de nouveaux gestes et savoir-faire, l'institutionnalisation d'une nouvelle branche de la médecine. Des années 1870 à la première guerre mondiale, Alain Contrepois restitue les mutations anthropologiques de la pratique clinique en France sans perdre de vue la bactériologie allemande de l'époque, constituée par des cliniciens et tout particulièrement Robert Koch, et dont la perception a sans doute été faussée par le climat politique et la préparation de la «Revanche».

«Ces recherches permettent de mieux comprendre comment les maladies infectieuses se sont inscrites dans l'horizon des cliniciens où elles continuent à tenir une place importante bien que leur définition, leur thérapeutique et leurs mécanismes pathologiques n'aient cessé de d'être remaniés jusqu'à nos jours.»

Anne-Marie Moulin