Zoltan Kemeny est né en Hongrie en 1907, il s'installe à Paris en 1930, ville qu'il fuit en 1942 pour Zurich, où il accomplira l'essentiel de sa courte carrière.

De son vivant, la présence de Zoltan Kemeny sur la scène artistique parisienne fut discrète, discontinue et de bien courte durée : en 1946, seul un artiste, lui-même encore très marginal, Jean Dubuffet, remarque sa première exposition ; en 1950, un jeune critique plein de discernement, Michel Ragon, s'enthousiasme pour sa seconde exposition ; les suivantes (en 1955, 1957 et 1961), dans la très chic galerie Facchetti, rencontrent une plus large audience. Dans l'intervalle, en Suisse, à New York, à la Dokumenta de Kassel et enfin à la Biennale de Venise de 1964 - où il obtint, lui qui se voulait peintre, le Grand Prix de sculpture -, Kemeny accède enfin à la notoriété internationale. Il meurt en 1965 ; le Musée national d'art moderne, en 1966, consacre à son oeuvre sa première grande exposition rétrospective. En deux donations successives, Madeleine, sa veuve, dote alors les collections nationales d'un ensemble de peintures, de reliefs et de dessins qui n'avaient encore jamais fait l'objet d'une publication. La description et l'étude des cent sept oeuvres qui la composent ont été accompagnées d'analyses délivrées par les meilleurs spécialistes suisses, susceptibles de percer à jour l'inspiration mystérieuse et sophistiquée d'un artiste secret dont l'activité de dessinateur de mode - sa face cachée - occupait, plus qu'on ne le croyait, une place éminente dans son processus créatif. Pour la première fois, ses peintures et relief-collages sont documentés par ses carnets de notes et dessins préparatoires et compilés avec les souvenirs de sa Hongrie natale et de ses glanes visuelles prélevées dans l'iconographie des bibliothèques et musées parisiens et zurichois. Ses reliefs métalliques sont présentés aux côtés de leurs études préparatoires pour apparaître comme de véritables abstractions soudées, agencées au millimètre près. Dans ces pages, Zoltan Kemeny révèle l'étendue de son talent, confronté à ses sources, à sa vie et aux oeuvres de ses contemporains, dont ses exils le tenaient à distance, mais parmi lesquels on peut désormais le réinsérer.