Du XVI^e siècle à nos jours, des oeuvres d'art ont été réalisées en Europe à partir d'objets naturels ou artificiels venus d'ailleurs. Parallèlement, des lieux ont été conçus dans l'habitat européen pour accueillir des objets extra-européens. Aussi est-ce autour du concept d'objet frontière et de son extension spatiale que l'ouvrage s'est construit.

Dans le brassage de la culture matérielle et des transferts culturels, le concept est original et novateur. Après une enquête menée en Europe pour déterminer le champ d'application des objets frontière, au terme d'une exposition consacrée aux espaces frontière sous le regard du photographe et à la suite de la publication de quatre volumes de la collection « Objets frontière » aux Éditions Gangemi à Rome, Sabine du Crest réunit les conclusions d'historiens de l'art et d'anthropologues. Démontrant la richesse épistémologique du concept d'objet frontière, ces derniers ont posé un regard nouveau sur des artefacts et des espaces se déployant dans l'entre-deux.

Matérialisées par la ceinture huronne de la Vierge de la cathédrale de Chartres, par les textiles chinois incorporés au trésor des églises portugaises, par les nautiles et coquillages des Wunderkammern, par les panneaux de laque du Japon intégrés aux chefs-d'oeuvre de l'ébénisterie parisienne, par les oeuvres « africaines » d'Arman, ces multiples exogenèses colonisent également l'univers clos des cabinets de curiosité, l'immense réseau des compagnies des Indes, les mexicaineries du Second Empire, ou bien les intérieurs exotiques fin-de-siècle.