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Analyse du discours et littérature : problèmes épistémologiques et institutionnels

dans Université de Tel-Aviv


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  • Date
    • 2008-09-19T02:00:00Z
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    • Le développement, depuis les années 1990, d’une « analyse du discours littéraire » soulève des difficultés épistémologiques et institutionnelles, pour les spécialistes de littérature comme pour les analystes du discours. On commence par considérer les résistances à l’analyse du discours littéraire qui viennent des spécialistes de littérature. Mais ces réticences rejoignent celles des analystes du discours à l’égard de la littérature ; car depuis les années 1960, l’analyse du discours a pris l’habitude de ne traiter que des textes délaissés par les facultés de lettres. Pourtant, le fait que se constitue à l’intérieur de l’analyse du discours une branche dédiée spécifiquement au discours littéraire donne davantage de consistance à un postulat fondateur de l’analyse du discours, à savoir que le discours est « un » : toute énonciation socialement circonscrite peut a priori être abordée à travers le même réseau de concepts. Ce postulat doit néanmoins être associé à un autre, celui de la « diversité » irréductible des modes d’existence de ce discours. Ce double postulat a des conséquences importantes sur le plan institutionnel, puisqu’il met à mal la frontière entre les départements de lettres et ceux de sciences sociales et humaines. Ce qui n’a rien d’étonnant, si l’on songe que l’étude de la littérature ne constitue pas véritablement une discipline. Encore faut-il s’entendre sur ce que signifie ici « discipline ». Une distinction doit être établie entre les disciplines au sens institutionnel, et les disciplines heuristiques, celles qui structurent la recherche. En outre, à l’intérieur de ces dernières, on peut distinguer les groupements fondés sur un intérêt épistémologique partagé, et les groupements autour d’un même objet, d’un même « territoire », qui est abordé par diverses disciplines. Il en ressort qu’en fait, dans le monde universitaire, le domaine appelé « littérature » s’accommode d’un compromis instable entre une logique du « territoire » et une logique « herméneutique », qui légitime le littéraire par sa capacité à entrer en contact avec des textes prestigieux en surplomb de l’ordinaire de la vie sociale. Grâce à ce compromis, le littéraire commente les œuvres en s’appuyant sur des routines interprétatives et son propre charisme, tout en s’efforçant de montrer que son activité appartient de plein droit à un monde scientifique que, par ailleurs, il disqualifie en tant qu’herméneute. Dans ces conditions, on comprend que l’analyse du discours soit mal perçue du littéraire traditionnel, car elle s’avère beaucoup plus menaçante pour ce compromis que des approches de la littérature issues de la psychologie ou de la sociologie. Elle se construit en effet sur le rejet de la topique même qui oppose un intérieur et un extérieur du texte, un texte et un contexte. Face à cette menace, pour préserver l’autonomie de leur espace et leur autorité, les littéraires recourent aujourd’hui à deux stratégies qu’on pourrait métaphoriquement désigner comme la fuite vers le haut, vers la philosophie, et la fuite vers le bas, vers l’érudition. Dans un dernier temps, on montre en quoi son ouverture à des corpus littéraires oblige l’analyse du discours à se préoccuper davantage de la question du texte, en accordant un rôle privilégié à la mémoire, à la diversité des supports matériels, aux modes de diffusion, à la diversité des usages des textes. De même, elle l’incite à renouveler sa réflexion sur l’« auctorialité » et sur la question des appareils d’interprétation : quand il s’agit de textes littéraires, philosophiques, religieux, scientifiques…, il faut accorder une place essentielle à un tiers invisible : les communautés de commentateurs et leurs pratiques.
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