Le discours sur la dignitas hominis et les topoi relatifs à l’homme « Dieu terrestre », véritable miracle de la nature comparé aux bêtes brutes créées uniquement pour le servir, se répandent au xvie siècle au point de constituer le discours philosophique dominant, sur lequel fera fonds Descartes au siècle suivant. Toutefois, parallèlement à Montaigne qui pose un regard sceptique et désenchanté sur de tels topoi dans l’Apologie, la tradition du conte qui émerge en Europe à la même époque propose des figurations qui invitent à douter des privilèges de l’homme. Des histoires médiévales comme « Canis » (dans le Dolopathos), qui se fait l’écho de lointains récits de sagesse orientale, des contes de Straparola comme « Fortunio » ou « Il Re Porco » (Le Roi Porc), « Cagliuso » de Basile mettent en valeur des motifs comme la métamorphose, l’animal serviable, l’ingratitude humaine. De tels contes font entendre une voix dissonante par rapport au discours hégémonique de tradition judéo-chrétienne. Le lecteur est ainsi conduit tantôt à s’interroger sur la bordure entre l’homme et l’animal, tantôt à reconsidérer la thèse de la supériorité morale de l’homme.