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Médecines créoles guyanaise et haïtienne face au Covid-19

dans Laboratoire Éco-anthropologie


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  • Date
    • 2024-01-10T01:00:00Z
  • Notes
    • Dans le contexte de la pandémie de Covid-19, l'utilisation de plantes médicinales pour prévenir ou guérir les symptômes du Covid-19 a prévalu chez les personnes interrogées au sein des communautés créoles guyanaise et haïtienne en Guyane française. Quassia amara a été la plante médicinale la plus fréquemment utilisée par les Créoles guyanais interrogés, tandis que Momordica charantia est l’espèce la plus mentionnée par les Créoles haïtiens. L’usage prééminent de plantes amères, tant en prévention qu’en thérapeutique curative, est une conséquence logique de la théorie traditionnelle des médecines créoles qui perçoit la fièvre comme le résultat d’un “sang sale” (disan sal, en créole guyanais) que seule l'amertume des plantes permettrait de soigner efficacement.Dans les nosologies créoles, le Covid-19 s’inscrit dans la macro-catégorie des « maladies à fièvre ». En effet, sur la base d’une analogie symptomatologique, cette maladie a rapidement été assimilée dans ces systèmes à d’autres pathologies provoquant de fortes fièvres. Les symptômes respiratoires sont également perçus comme qualifiants, mobilisant de nombreuses espèces traditionnellement utilisées pour soigner ces pathologies. Enfin, dans une moindre mesure, et surtout chez les membres des communautés chrétiennes, le Covid-19 est une « maladie du diable » (maladi Dyab, en créoles haïtien et guyanais), essentiellement du fait de la disruption globale qu’elle a causée. Les deux premières interprétations, autant que les remèdes mobilisés, s’inscrivent plus largement dans le cadre d’une recherche d’équilibre entre états « chauds » et « froids », très présente dans les médecines créoles à l’échelle du continent Américain.Une méfiance vis-à-vis des institutions de santé ainsi qu’envers les messages qu’elles diffusent a été clairement exprimée, ce qui a conduit à un repli identitaire par le biais de réseaux transnationaux (numériques). Contrairement au pluralisme habituel, un clivage fort entre biomédecine et phytothérapies locales a été relevé, et notamment une défiance importante de la population créole vis-à-vis des vaccins. Cette opposition s’est largement matérialisée sous la forme d’un communautarisme du « eux » contre « nous », « leur vaccin » contre « nos plantes ». Cette foi dans les plantes, en prévention comme en soins, alors que les risques liés à la maladie sont minimisés, tandis que les effets secondaires des vaccins sont exagérés, est très relayée par certains réseaux sociaux. Une des explications peut être cette perception de la non-nouveauté de la maladie prise en tant qu’ensemble de symptômes déjà appréhendés, ainsi que de la forte valence préventive des phytothérapies créoles.
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