En tant que matériau issu d’une production industrielle, le film est techniquement reproductible, et ne semble donc pas, à première vue, poser de problèmes particuliers quant à son existence « multiple ». Cependant, lorsque l’on observe dans le détail la culture matérielle et l’histoire de la circulation des films d’artistes, le scénario apparaît d’une toute autre complexité. Cet article vise à reconsidérer, sous l’angle de la conservation-restauration, et à partir de l’œuvre de Nam June Paik Zen for Film (1962-1964), exemplaire à cet égard, le statut particulier (multiple) du film d’artiste, considéré à la fois en tant qu’objet et événement (une copie et une projection) – deux modes d’existence qui s’excluent mutuellement dans leur présentation. Les conséquences théoriques de cette observation nous signalent une fausse opposition entre « unique » et « multiple » dans le domaine du film.