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Dysplasie faciale chez les chimpanzés sauvages de Sebitoli, Parc national de Kibale, Ouganda : la pollution environnementale en cause ?

dans Société francophone de primatologie


  • Éditeur(s)
  • Date
    • 2014-01-08T01:00:00Z
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    • Les déformations des membres sont fréquentes chez les primates. La plupart résultent de piégeage, de chutes ou de conflits. Les malformations d’origine congénitale sont généralement beaucoup plus rares, atteignant à peine 1% des populations de primates humains et non humains. Cependant, certains groupes de macaques au Japon et à Hong Kong sont sévèrement affectés par des anomalies des membres. Jusqu’à 17% des individus sont atteints dans certaines troupes vivant en liberté mais approvisionnés en nourriture. Au contraire, les malformations faciales d’origine congénitale sont rarement décrites chez les primates sauvages non humains. Seules des lésions faciales d’origine bactérienne, de type pian, sont rencontrées avec une forte prévalence dans certaines populations de grands singes. Dans le parc national de Kibale, en Ouganda, notre travail d’habituation dans la zone nord de Sebitoli nous a permis d’observer des phénotypes faciaux singuliers. Huit des 80 chimpanzés (Pan troglodytes schweinfurthii) présentent un nez aplati avec des narines réduites ou absentes et une face concave, sans qu’aucune lésion de la peau ne soit visible. Parmi les individus atteints, on trouve des mâles et des femelles, âgés de 18 mois à 18 ans. Les caractéristiques faciales observées chez les chimpanzés évoquent le syndrome de Binder décrit chez les humains. Ce syndrome résulte d’une perturbation de la formation des structures nasales pendant l’embryogénèse. Des agents anti-vitamine K, ingérés par la mère, sont invoqués dans certains cas. L’étiologie des malformations congénitales des membres chez les macaques serait selon certains auteurs en relation avec la présence de pesticides présents dans les aliments donnés aux singes. A Sebitoli, plusieurs causes peuvent être suspectées. Dans les années 70, les exploitants forestiers ont utilisé des arboricides défoliants dans cette zone. Aujourd’hui, le territoire de la communauté de chimpanzés est entouré de plantation de thé, de maïs et de jardins vivriers dont les traitements par intrants chimiques peuvent contaminer l’environnement dont l’eau et le sol. Les chimpanzés sont exposés à la pollution du sol car ils pratiquent régulièrement la géophagie. Par ailleurs, ils pillent parfois les plantations de maïs des villageois, ingérant les épis et les tiges. Enfin, ils sont aussi exposés aux particules de combustion des carburants des véhicules circulant sur la route nationale à fort trafic qui coupe leur territoire. La pollution environnementale pourrait donc être en lien avec les malformations observées dans cette communauté. Outre le braconnage et les maladies infectieuses, les risques induits par la pollution de l’habitat font partie des conséquences sanitaires de l’anthropisation du milieu qui ne doivent pas être négligées pour la préservation des grands singes.
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