• Aide
  • Eurêkoi Eurêkoi

Article

Périphéries gauche et droite


  • Éditeur(s)
  • Date
    • 2023-01-27T01:00:00Z
  • Notes
    • Cet article décrit une étude contrastive pilote de quatre expressions de périphérie, deux françaises et deux anglaises. S’entend par “expression périphérique” une expression positionnée en début (périphérie gauche (PG)) ou à la fin (périphérie droite (PD)) d’un énoncé sur lequel elle porte et qui fonctionne comme hôte. (Nous laissons de côté, dans le contexte de cet article, la nature exacte du lien formel entre l’expression périphérique et son hôte.) Ces positions périphériques sont des sites privilégiés pour l’expression de l’attitude du locuteur envers l’idée contenue dans l’unité hôte et pour l’expression de relations de cohérence entre cette idée et la précédente. Elles accueillent un éventail de connecteurs adverbiaux et de particules discursives. L’étude pilote propose un cadre, dans une approche fonctionnelle, pour l’identification et l’analyse d’éléments périphériques dans le contexte de la linguistique contrastive (français/anglais). Ensuite l’étude a deux buts principaux. Le premier consiste à vérifier, pour les expressions se positionnant en PG et en PD et dans leurs contextes, si des corrélations existent entre position et fonction, prosodie, structure informationnelle ou la syntaxe de l’hôte (et éventuellement d’autres paramètres du co-texte). Il s’agit d’explorer, si la position s’avère ne pas être aléatoire, les possibles motivations dans chaque cas. Le deuxième but, et le focus de l’article, consiste à analyser les fréquences et les distributions dans une perspective contrastive français/anglais, pour identifier des généralisations éventuelles sur les deux langues. La variation interlocuteur est également contrôlée. Les variables principales sont donc la position (droite vs. gauche) et la langue (français vs. anglais).La recherche récente sur les périphéries s’est focalisée sur quatre questions majeures : la définition des périphéries, y compris l’élaboration d’un modèle syntaxique capable de rendre compte des expressions périphériques ; la détermination de l’ordre des expressions périphériques au cas où un énoncé en accueille deux ou plus ; le traçage de l’évolution des expressions périphériques en diachronie ; et l’identification d’éventuelles corrélations entre position et fonction.Les deux premières questions ont surtout été abordées en linguistique formelle, où un modèle cartographique de la structure syntaxique de la périphérie a été développé (par ex. Speas & Tenny 2003 ; Haegeman & Hill 2013 ; Rizzi & Cinque 2016). Jusqu’à tout récemment le statut syntaxique des éléments périphériques, comme les particules discursives et les connecteurs adverbiaux, a été peu étudié dans la tradition fonctionnelle, ces éléments étant considérés comme “en dehors” de la syntaxe (par ex. Kaltenböck et al. 2016 ; Brinton 2017). Certains chercheurs néanmoins posent un créneau syntaxique spécifique aux particules discursives en début d’énoncé (par ex. Aijmer 1996) ; d’autres encore posent qu’une grammaire du discours, différenciée de la grammaire de la phrase, doit rendre compte des périphériques (par ex. Heine et al. 2013, Fernandez Vest 2015). D’aucuns suggèrent, pour l’anglais, que les particules à la PD constituent un paradigme formel (Haselow 2013).Ce sont les deux dernières questions qui ont capté plus d’attention. En diachronie, à en juger par les résultats d’études sur des langues européennes, la PD serait un développement assez récent qui peut être considéré comme une “grammaticalisation poussée”, la plupart des formes occupant la PD étant attestées avant à la PG. Les différentes fonctions éventuelles associées à la PG et la PD ont été abordées en pragmatique et analyse du discours. L’hypothèse est très citée que la PG accueille la subjectivité (l’attitude du locuteur) alors que la PD accueille l’intersubjectivité (les relations entre le locuteur et son interlocuteur) (par ex. Degand et Fagard 2011 ; Beeching et Detges 2014a). Des études sur différentes langues pourtant ont révélé quelques confirmations et quelques contre-exemples sans arriver à des conclusions solides (Traugott 2012). Pour les éléments périphériques dont la fonction est connective, il a été proposé qu’à la PD, soit ils expriment une connectivité rétrospective très étroite entre l’hôte et l’idée précédente (Haselow 2012), soit ils modifient la modalité de celle-ci, tandis qu’à la PG ils expriment une connectivité moins étroite et peuvent porter sur plusieurs segments du discours. Peu d’études ont abordé le rôle des périphériques, que ce soit à gauche ou à droite, dans la proéminence ou dans la structure informationnelle. Peu d’études ont abordé la prosodie (v. Wichmann 2001 ; Bertrand et Chanet 2005 ; Dehé et Wichmann 2010 ; Romero Trillo 2018). L’idée est souvent citée que les particules discursives, surtout à la PG, manifestent une “intonation de virgule”, mais cette supposition repose sur peu de données concrètes et elle a été remise en cause. Il a été proposé pour l’anglais qu’à la PD les périphériques manifestent une prosodie intégrée (Haselow 2016). Si des études sur des langues variées ont commencé à éclaircir beaucoup de ces questions, peu d’études ont adopté une perspective contrastive.Deux expressions ont été retenues pour cet article : alors pour le français et then pour l’anglais. Ces expressions ont en commun que de leurs origines lexicales elles se sont développées en adverbes modaux, puis en particules discursives et/ou en connecteurs. Alors et then sont des adverbes temporels qui ont évolué dans le même sens vers des polysémies non temporelles. Plus pertinent pour cette étude est leur positionnement tant à la PG qu’à la PD en tant que particules discursives de divers types.Cette étude sur corpus commence par décrire la méthodologie pilote pour l’analyse contrastive. Les données proviennent d’échantillons de dialogue comparables pris dans des corpus oraux. Sont codées les positions des occurrences (et leurs co-textes) ainsi que les quatre paramètres cités ci-dessus (fonction, prosodie, structure informationnelle, syntaxe). Les résultats des analyses révèlent des différences de fréquence, de distribution et d’usage sur les deux langues pour le genre comparable. Ils pointent également une différenciation accrue entre alors et then pour les fonctions plus abstraites et interactionnelles. Les résultats de cette étude pilote nous servent pour affiner l’approche en vue d’une étude quantitative sur des expressions périphériques à base de corpus plus grands.
  • Langues
    • Français
  • Sujet(s)
  • Droits
    • info:eu-repo/semantics/openAccess .
    • https://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/
  • Résultat de :