Quelque part dans l'immensité du veld sud-africain, un homme arrive dans un terrain vague et y prend ses quartiers. M. et Mme Malgas, les occupants de la maison voisine, observent avec la plus grande attention cet intrus qui interrompt singulièrement leur routine. Monsieur est quincailler, Madame dépoussière les bibelots, regarde la télévision et attend le retour de son mari.

L'inconnu explique à son voisin, de plus en plus fasciné, son plan : la construction très mystérieuse de sa maison, une maison mentale. La voisine, quant à elle, est convaincue de la folie de cet homme qu'elle s'obstine à appeler « l'Autre », et qui lui vole son bon mari.

Folie est un huis clos à trois, récit d'une désillusion comique, tissée de clous et de fils, de chimère et de mots.

« J'en ai monté, des tentes, dans ma vie, fit le patron à la patronne un peu plus tard, au petit déjeuner. Comme tu sais, je suis du genre aventureux, j'ai visité des endroits plutôt insolites, mais je n'ai jamais rien vu de pareil. Complètement fantaisiste. Pousse-toi de cette fenêtre. »

Mme Malgas ne bougea pas. Elle regardait l'étranger brouter une feuille, lever ses grands pieds et les reposer calmement, les yeux rivés sur le sol. Les longs membres et les articulations noueuses de l'homme la fascinaient. Clip, clop. La démarche était celle d'une antilope, paresseuse et désarticulée.

« Qu'est-ce que c'est, déjà, comme type de tente ? demanda-t-elle.

- Une tente à deux places.

- Précisément. C'est ça qui me chiffonne.

Lui, il est tout seul. Qu'est-ce qu'il va faire d'une tente à deux places ?

- Il est assez grand.

- Vas-y, prends sa défense. Mais écoute bien ce que je te dis : cet homme n'augure rien de bon. Je le sens à des kilomètres. »