Le droit musulman

Des réformateurs médiévaux au réformisme contemporain

À défaut de clergé, l'Islam voit dès ses premiers siècles apparaître en son sein une multitude d'écoles de pensée disposant chacune de sa propre interprétation de la Charia (droit religieux). Mais à l'image du concile de Nicée qui fit de l'Église catholique l'unique représentante de la Chrétienté, les califes abbassides, désireux de réduire les divergences doctrinales en terre d'Islam allaient, à partir du Xe siècle, tout mettre en oeuvre pour provoquer un consensus religieux (idjmâ') mettant un terme au libre examen des Écritures.

Ce consensus ne se manifesta cependant pas sans de fortes oppositions. Nombre de penseurs musulmans allaient courageusement et au péril de leur vie s'élever contre ce conformisme : le traditionniste Ibn Hazm, le cadi-philosophe Averroès, le mystique Ibn 'Arabî en Andalousie ; les puristes Ibn Taymiyya et Ibn al-Qayyim en Syrie ; ou encore les juristes Ibn al-Humâm et al-Suyûtî en Égypte... Etouffée sous le poids de l'orthodoxie, la voix de ces penseurs hors pair ne se fit pas suffisamment entendre, et leurs idées faillirent sombrer dans l'oubli. Pour éviter cela, il aura fallu attendre l'avènement au XIX^e siècle du courant réformiste de la Nahda, dont les adeptes s'employèrent à réhabiliter les thèses des réformateurs médiévaux avant d'en faire le fondement doctrinal de leur projet « d'Éveil » ou « Renaissance » du monde arabo-musulman.